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Toi qui entre ici, abandonne tout espoir
 
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(TERMINÉ) - (Flashback) - Livan ▿ Mercy

Andréas
Messages : 614
Date d'inscription : 26/11/2014





Andréas
Mer 16 Mai - 19:17

Mercy
Ma cigarette au coin des lèvres, je tire sur le tabac dégueulasse avec une certaine lassitude, adossé sous une fenêtre, ma radio sur le coeur. Quelques flocons passent par la fenêtre brisé qui me sert d'ouverture sur le monde extérieur et un soupir m'échappe. Je hais ce pays, tout ici semble différent…. La neige est crasseuse, l'air est vicié et même le silence semble plus dur à supporter. Enroulé dans mon épais manteau, mes doigts à peine au chaud dans mes mitaines, j'enchaîne les cigarettes en attendant qu'il se passe quelque chose. Je sais que les autres ne sont pas loin et que nous ne sommes là que pour descendre un éventuel convoi qui devrait passer dans le coin, mais la solitude commence à me peser. Perché dans cette vieille maison, je commence à trouver le temps long. J'écrase mon mégot contre le mur et je reprends ma place, observant au travers de mon viseur la neige tomber et l'absence des civils qui se terrent comme des rats. Tant mieux. Il m'a fallut en descendre cinq avant qu'ils ne comprennent qu'ici c'était désormais mon territoire de chasse. Le premier pensait être capable de courir plus vite que mes balles. Les quatre suivants voulaient simplement récupérer son corps. Sûrement des membres de sa famille qui désormais sont recouverts par la neige ensemble. On pourrait les bouger, on pourrait les enterrer, mais je trouve ça plus poétique de laisser la glace les recouvrir. Je renifle et expire une légère volute de fumée qui se perd dans l'air, passant ma langue sur mes lèvres gercées alors que j'attends. Je patiente et fais du froid mon allié. J'en fais un compagnon exigeant mais fidèle. Je fais du silence une symphonie complexe, composée des battements de mon coeur, de ma respiration et du chant du vent sur la neige. Je patiente et lentement, j'apprends à saisir le monde qui m'entoure. J'en apprends chaque détails et m'émerveille de la moindre nouveauté. Un chat qui passe et c'est mon coeur qui s'emballe. Un oiseau dans une branche et c'est mon souffle qui se bloque. Un battement d'aile dans l'air et c'est une coup de feu qui retentit.

Il y a un léger bruit quand le petit corps encore chaud tombe dans la neige au loin. Je l'entends se débattre furieusement dans la poudreuse alors qu'au travers de mon viseur, je m'amuse de sa volonté de survivre. Je souris en voyant son aile brisée qu'il agite furieusement. Je ris en me disant que j'aurais pu simplement l'abattre. Je fais sauter la douille du fusil et alors que celle-ci émet un doux bruit sur le plancher, voilà que j'entends ma radio crachoter. Pendant quelques secondes je n'entends que des grésillements alors que le pauvre moineau continue de soulever de la poudreuse et de répandre sur celle-ci quelques malheureuses gouttes de sang. La mort vendra. Que tu sois prêt ou pas, elle viendra quand même.

"Putain de merde, Baranov. Y'a le bleu qu'a faillit se chier dessus…."

Je souris et pense à ce pauvre gamin qu'on trimballe avec nous, le jeune infirmier encore persuadé qu'il peut sauver des vies. Cet idiot voulait aller les cinq inconscient que j'ai abattu. J'ai du faire siffler une balle à ses oreilles pour qu'il comprenne que je ne supportais pas qu'on touche à ce qui m'appartiens. L'oiseau perd de sa volonté de combattre et au fil de ses vaines tentatives pour se révéler, c'est un peu plus de rouge qu'il étale et un peu moins de neige qu'il soulève.

"C'est rien. C'est rien. C'est bientôt la fin champion… Laisse-toi porter. Tout va bien."
"… Et si c'est parce que tu as recommencé à tirer sur des putain de chats, je te jure que ce soir je te colle de corvée de chiottes."

J'éclate de rire et reprends ma position. L'oiseau se fige et je ne vois plus qu'un tas de plumes inertes, une petite chose qui un jour était capable de voler et qui désormais n'est plus que le repas d'un charognard. J'attrape ma radio et la porte à mes lèvres.

"Je tuais le temps, je commence à me sentir franchement seul là-haut et j'ai pas grand monde pour me tenir compagnie. Donc si y'a un volontaire pour venir me distraire… "

Silence radio et je lève les yeux au ciel. Les heures passent sans qu'un mot ne glisse de mes lèvres et quand le froid se fait trop mordant, je me glisse au sol une fois de plus, attrapant la radio pour chercher un peu de réconfort. J'allume une autre cigarette et d'une voix rauque quoi que légèrement fatigué, je ronchonne contre mon briquet et l'opérateur radio.

"Je commence à en avoir ras-le-cul de faire du tir au pigeon. Qu'est-ce qu'on branle encore là ? Le convoi ne devait pas passer y'a deux heures ?"

Le briquet crachote enfin une flamme et j'arrive à allumer ma cigarette, tirant une volute de fumée et un léger murmure à la braise.

"Bon et sinon, y'a moyen d'avoir en ligne une belle fille pour me dire que j'ai été un mauvais garçon ?"

J'ai un sourire sachant pertinemment qui s'occupe de la radio pour cette mission. Je sais qu'avec un autre ça aurait été mal pris… Mais Ivan ? Ivan ça le fait toujours marrer de parler des demoiselles comme si c'était toutes des salopes. Alors ouais, avec lui je sais que je pourrais lui dire que je suis un mauvais garçon, il me dirait qu'il est une méchante fille. Enfin… Du moins je crois qu'il le ferait. Je pense.©️ 2981 12289 0
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Andréas
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Andréas
Mer 16 Mai - 19:19
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Lev Baranov
« Mercy »
Lev & Ivan
Le froid. Le froid partout, tout le temps. Le froid qu'on entre ou qu'on sorte d'un bâtiment, du matin au soir et encore pire la nuit. De la neige à perte de vue, sur les arbres, sur les maisons, sur les routes et les chemins mais aussi sur les camions de matériel, sur les caisses, et sur nous. La moindre marche, la moindre attente nous couvre d'une couche de coton épais et glacé, comme si les réservoirs du ciel étaient infinis et qu'ils ne pourraient jamais s'épuiser. Et ça dure depuis des semaines. Depuis notre arrivée, quand notre régiment a été envoyé pour mater les poches d'insurrection en Ukraine. Des bandes d'ingrats qui clamaient que l'Ukraine était un pays libre, et qui crachaient sur tout ce que notre Mère Patrie avait fait pour eux, elle qui avait veillé sur l'Ukraine comme une mère sur son enfant. Ils allaient le payer.

Notre régiment avait donc débarqué près de Kharkiv, et le trajet en camion avait été long et fastidieux depuis Moscou, mais j'étais avec mes hommes. Le premier régiment que j'avais sous mes ordres depuis que j'avais été promu commandant. Je les avais rencontrés quelques semaines plus tôt, nous nous étions entraînés ensemble avant d'avoir été envoyés ici. J'avais eu un peu de temps pour les découvrir tous. La trentaine de types qui allaient me suivre dans cet enfer de neige et de glace. Pendant des jours, on a commencé à traquer ces types, à suivre les rapports des services secrets pour savoir au mieux où ces chiens se terraient. Plus les jours passaient et plus on est arrivé à en attraper. Ils attendaient dans une vieille prison de la guerre froide, cachée de tous, en attendant qu'ils soient transférés à Moscou pour y être jugés, et recevoir la punition qu'ils méritaient pour leur trahison. Pour la plupart, quelques hommes montaient un piège, habillés en civil, et tout se faisait dans la surprise et la discrétion. Aux yeux de tous, ils "disparaissaient". Mais parfois... parfois ça tournait mal. Parfois ils nous attendaient retranchés dans des maisons, ou pire, des appartements, avec des civils à côté, et ça se finissait parfois beaucoup moins bien. Il arrivait même qu'on ramène un cadavre ou un blessé soit sorti sous les huées de la foule à notre encontre. Ignorants. Ils ne savaient même pas de quoi on les avait délivrés...

Petit à petit, semaine après semaine, en sillonnant cette région glacée et couverte de neige on avait réussi à couper presque toutes les têtes de l'hydre. Il n'en restait plus beaucoup dans la nature. Nos renseignements nous avaient amenés à un petit village près de la frontière. Nous devions lui tendre une embuscade, car il était le fondateur de cette rébellion, le plus dangereux. Alexander Pistolerov, dit Le Pirate. Nous étions arrivés la nuit dans la bourgade à moitié déserte et nous nous étions installés dans un bâtiment désert, une vieille maison à moitié en ruines où la neige tombait sur nous par le toit défoncé. Encore cette foutue neige... Encore et toujours cette foutue neige. Avant le lever du soleil j'avais envoyé Lev, mon sniper de talent, dans le toit d'une des maisons les plus hautes, afin qu'il surplombe la ville, et qu'il soit tel l'aigle pour nous. Et nous, on attendait. On ne pouvait pas se montrer, car n'importe quel civil pouvait connaître Pistolerov et le prévenir. On devait être discrets. Et c'est pour ça que je suis devenu dingue en entendant des cris de surprise. Puis d'horreur. Il avait tué un des bras droits de Pistolerov, et empêchait les autres de s'approcher de lui. Putain. Ce crétin risquait de nous faire tous repérer. Et ça a continué. Au fond de moi je comprenais, il tuait tous ceux qui avait vu le corps, pour éviter qu'ils ne parlent, mais si notre cible ne se montrait pas très vite, c'est toute la ville qui risquait d'y passer. Lev était comme ça, un chien fou. Imprévisible. Qui n'aimait en faire qu'à sa tête. C'est le cas ici et je prends la radio pour lui passer le fond de ma pensée.

Lev, tu vas juste arrêter de te croire à la fête foraine et tirer sur les canards. La prochaine balle sera pour Pistolerov et personne d'autre. Et putain arrête de fumer si un type a un capteur thermique il va te repérer direct. C'est pas le sniper qui doit être un fantôme au milieu de nous tous? Attends le convoi et Pistolerov avec. C'est le seul que t'auras le droit de tuer.

Puis il arrive quand même à me faire rire, ce crétin, à la fin de la conversation.

Eh nan je ferai la mauvaise fille avec toi quand tu descendras. Et si t'as trop le feu au cul, tape-toi l'infirmier. Il est frais et tendre. Allez fin de la transmission. Pistolerov et lui seul ok? Terminé.

Je repose la radio et j'attends, avec dans les mains l'écran radar qui signale les cibles en approche. Les minutes sont longues et froides, encore. Puis enfin du mouvement. J'attrape mon talkie et rappelle mon aigle sur son toit.

Il arrive. On compte sur toi. On s'en fout de toutes les autres cibles, on veut Pistolerov.

Je coupe la communication alors que je saisis mon arme.

Messieurs ils arrivent. Préparez vous. Je ne veux pas de boucherie. Blessez si vous pouvez, au maximum. Seul Pistolerov compte.

Je les entends s'équiper, prendre leurs armes et vérifier leurs chargeurs avant de se mettre en position, accroupis derrière les fenêtres, les doigts sur les gâchettes, guettant la route glacée devant nous.
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Andréas
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Andréas
Mer 16 Mai - 19:20

Mercy
Sa voix grésille finalement dans ma radio et je souris, retroussant les babines comme un animal, alors que bien à l'abri, je regarde la fumée danser pour moi. Comme à son habitude il joue au grand, il me dit ce que je dois faire et ose me donner des leçons, comme si il pensait être capable de comprendre ce que je suis et ce que je fais. Il pense qu'il sait mieux que moi comment me terrer et apporter la mort. L'idiot. Si il savait… Si il voyait le monde à travers mes yeux, jamais il n'oserait aborder ce sujet avec moi. Il est un de ceux qui ne comprennent pas et qui pensent qu'un peu de pouvoir leur donne le droit de m'expliquer comment être une ombre. Mon briquet retrouve ma poche et lentement, je fume, faisant simplement claquer ma langue pour lui faire comprendre que je n'en ai pas grand chose à foutre. Qu'ils me trouvent, qu'ils viennent me chercher et je leur montrerais ce qu'il en est de s'en prendre à un des cavaliers de l'apocalypse. Je les abattrais un à un pour les offrir aux enfers. Leurs cadavres signeront ma victoire et leur sang sur mes joues seront mes peintures de guerre, mon camouflage à moi. Ivan me parle alors de l'infirmier et c'est un rire plus amer que le sien qui m'échappe. Un rire qui témoigne d'un certain inconfort.

"C'est ça. Fin de transmission."


Je coupe la radio et la dépose à mes côtés, me faisant subitement plus pensif. Frais et tendre. Je bats des cils et je sens une chaleur étrange réchauffer le creux de mes reins. Ouais, il l'est. Il a tout du jeune homme candide qui ne sait pas qu'il vient de vendre son âme pour un aller simple en enfer. Il est une douceur à la peau diaphane et à la gorge palpitante… Il est un moineau que j'ai envie d'avoir entre mes griffes… Une petite chose fragile que j'ai envie de briser. Mes doigts se referment sur la crosse de mon arme et au fil du tabac qui se consume et de la cendre qui tombe à mes pieds, j'imagine ce que ce serait d'avoir le plaisir de posséder ce corps frêle qui tremblerait pour moi. J'imagine le plaisir que j'aurais à lacérer cette peau pareille à de la soie, à sentir ses muscles bouger et rouler sous les paumes de mes mains alors que mes dents arracherait cette gorge palpitante, me permettant ainsi de goûter son sang. Un soupir chaud m'échappe et répond étrangement bien au léger brasier qui commence à ronronner au sein de mes entrailles. Ce n'est pas la perspective de le baiser qui m'excite mais celle de lui faire du mal, de le tuer… Ça ne peut être que ça… C'est le plaisir à venir de répandre chaos et destruction qui me donne l'impression que mon treillis est trop étroit. C'est l'idée de sentir le sang chaud sur le bout de mes doigts qui me rend fou… Rien d'autre. Ce n'est pas le corps d'un autre homme qui me fait frémir d'envie mais son cadavre que je pourrais avoir à mes pieds. Ma cigarette se consume et la braise chantonne au rythme des battements de mon coeur. Il n'y a que ça qui m'excite : le sang et la mort.

Je termine ma clope et l'écrase dans un coin, revenant me mettre en position pour attendre celui qui aura ma prochaine balle. Pendant de longues minutes, je regarde les flocons tomber au travers de mon viseur et le givre doucement recouvrir les feuilles. Dans un silence presque religieux, je fais taire mon souffle pour ne devenir qu'une ombre, guettant avec la patience d'un prédateur le moment où les cibles arriveront. Et au bout d'un moment, j'entends la neige craquer au loin et ma radio se remettre en route. "Il arrive", me dit-il. Je fais sauter la sécurité de mon fusil et me mets en place, calmant déjà mon souffle alors que je compte les battements de mon coeur. Au loin j'entends le ronron des moteurs et un dernier frisson que je ne remarque presque pas glisse le long de mon échine. Trois jeeps. Modèle russe. Sûrement des prises de guerres. Je vois la première pointer le bout de son nez et la laisse passer, me retenant de justesse de tirer dans le moteur. Non, le capitaine n'est pas là, pas avec les éclaireurs. Le carrosse royal est toujours le deuxième, et le roi… Le roi se pavane toujours. La deuxième jeep s'engage et se montre à moi. Le doigt sur la gâchette je l'attends et le cherche. Ce n'est pas lui qui conduis, non… Il est à l'arrière, entouré comme d'habitude de ses gardes. Un sourire se glisse sur mes lèvres et sagement, j'attends que les autres entrent en scène pour foutre le bordel. J'entends la voiture des éclaireurs être attaqué et bien rapidement, c'est le bordel. Je passe ma langue sur mes lèvres et alors qu'en bas c'est l'enfer quid se réveille, je me sens comme un dieu qui fauche les braves en plein combat. Je me sens puissant. Invincible. Je me sens comme la Faucheuse. Les tirs fusent et je garde ma balle pour la cible. Je regarde les hommes tomber, le sang couler et ma trique revient. L'excitation gagne de mon être et mon sang bout dans mes veines. Montre-toi…. Montre-toi sale fils de pute. Révèle-toi à moi et offre-moi ta vie. L'homme finit par se révéler à moi et il me suffit d'une seconde pour presser la détente.

"Touché."

L'homme s'effondre et un silence tombe presque. Les cris sont toujours là, mais moi, j'entends sa mort, je la vis, je la contemple. Son corps s'écroule dans la neige et je fais sauter la douille sur le plancher, rechargeant déjà. Regardez. Il est mort. Je me remets en place et avec un immense sourire aux lèvres, j'abats un autre homme. La douille suivante termine sur le plancher et je recommence. Tant qu'on ne me voit pas, je suis l'ange de la mort qui abat les faibles. Craignez-moi. Vénérez-moi. Un rire glisse d'entre mes lèvres et alors que je m'apprête à tirer une fois de plus, une violente douleur à l'épaule gauche me saisit. Mes doigts se crispent sur mon arme et le souffle me manque. Non. C'est impossible. Je me redresse à peine et contemple alors l'immense plaie béante qui est désormais mon épaule. Je regarde le sang tacher ma veste et j'écarquille les yeux. Ce n'est pas possible. Personne ne peut m'abattre. Je suis l'ange de la mort. Mon arme glisse d'entre mes mains et lourdement, je m'écrase au sol, presque terrassé par la douleur. Rapidement la tête commence à me tourner et je comprends que la balle m'a sûrement déchiré une artère. J'ai que quelques secondes avant d'y passer. Quelques instants avant que je ne sombre. J'attrape la radio et l'allume difficilement, articulant alors mes derniers mots.

"Besoin…. Infirmier. Vite."©️ 2981 12289 0
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Andréas
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Andréas
Mer 16 Mai - 19:20
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Lev Baranov
« Mercy »
Lev & Ivan
De toute mon équipe, Lev est le plus dur à cerner. Il est étrange. D'apparence, il est comme les autres, il aime faire des blagues de cul comme Andrei, il a la descente de Piotr, il est brave comme Yuri et mutique par moments comme Vassili. Il a l'air d'un type normal, un peu froid et un peu distant, ce qui, vu qu'il est sniper, est encore accentué. Il est sur le terrain avec nous, mais ailleurs. Il voit les mêmes choses que nous, mais quand ce sont nos yeux qui nous renseignent sur ce qui arrivent, lui voit tout à travers la lunette de visée de son fusil. Il est l'épervier au regard vif, qui fond sur sa proie d'une balle. Nos yeux dans les cimes. Un peu notre ange gardien, car plus d'une fois il nous a débarrassé d'une menace avant même qu'on la soupçonne. Et pourtant il y a quelque chose chez lui qui me dérange. L'ensemble d'entre nous tue parce qu'il doit tuer, et parce que la mort est le dernier recours. Parce qu'on n'a pas pu faire autrement, ou bien que c'était lui ou nous. Lui... lui est différent. Dans ses yeux je lis cette étincelle de plaisir et d'amusement là où chez nous seule la flamme du devoir et de l'amour de la patrie brûle. Ce n'est pas le même bois qui alimente notre flamme intérieure. Et encore... plus je le côtoie et plus je sens qu'il y a quelque chose de plus noir dans son âme. Il aime le sang.

Au début je ne m'en étais pas rendu compte, il faisait parfois une ou deux victimes de plus que nécessaire, mais après tout, on était dans l'armée, pas au ballet du Bolchoï, et nous n'étions clairement pas les choeurs de l'armée rouge. Sauf que... sauf que plus d'une fois je l'ai vu prendre du plaisir à tuer. Beaucoup trop. Nous nous battons pour nos idées, pour de l'argent, par obligation... mais j'ai l'impression qu'il a choisi de faire la guerre parce que ça lui permettait d'être sur les champs de bataille. Il me donne l'impression d'aimer jouer à Dieu, à dominer le monde depuis les endroits les plus élevés, et frissonner en étant celui qui laisse vivre ou qui fait mourir. Qu'il se prend pour la Mort, sauf qu'au lieu d'être monté sur un cheval noir, il se déplace dans une jeep kaki. Il aime faire couler le sang, et être celui qui décide qui, quand et où. Jusqu'à présent il a toujours fait son boulot, mais une partie de moi a peur qu'un jour il ne se contente plus des cibles que je lui désigne. Qu'un jour il oublie les limites et les règles, et finisse par juste avoir envie de tuer. Peu importe qui. Peu importe pourquoi. Juste pour sentir qu'il peut le faire. Pour avoir le frisson d'imposer la mort et que ses victimes ne sachent même pas qui les frappe, comme un châtiment divin. Donné par lui, pour des crimes qu'il ne connaît même pas. Il est le loup solitaire qui tue pour le plaisir de la traque et le goût du sang, mais qui ne se nourrira pas sur sa victime et l'abandonnera aux corbeaux.

Et à présent j'attends, mon arme en main et le coeur battant, que le fameux convoi arrive. Une de nos dernières cibles, et on pourra rentrer. Je retrouverai mon Sasha et Vali, et ma vie à Moscou. Tout comme les autres, la mission a été longue, et ça fait presque deux mois qu'on n'est pas rentrés. Alors là, se joue peut-être notre sésame pour pouvoir rentrer chez nous. Tout le monde est silencieux, et je sens la nervosité et l'impatience qui montent en nous. Vingt mètres. Je vérifie que j'ai bien ôté la sécurité de mon arme. A ma droite j'entends Yuri qui prie silencieusement, et à gauche Piotr qui soupire lourdement, ses doigts se crispant sur la gâchette. Quinze mètres. Je déglutis alors que les ronronnements des moteurs s'intensifient et s'approchent. Vassili vérifie que son chargeur est bien plein et qu'une balle est déjà dans le canon. Dix mètres. Cinq mètres. Deux mètres. Je lève la main après avoir jeté un léger coup d'oeil par la fenêtre brisée, et vois le convoi qui descend le long de la grande route. Trois. Deux. Un. D'un signe je lance l'attaque et on se tourne tous, commençant à tirer sur la première Jeep, histoire de les faire s'arrêter. Mes gars immobilisent la première voiture, obligeant les deux autres à ralentir. Enfin... le chauffeur de la deuxième tente de forcer le passage, mais je vois d'un coup une gerbe de sang inonder le pare-brise intérieur comme une rose qui vient d'éclore, et le véhicule perd sa trajectoire. Le passager tente de se pencher pour prendre le volant, et rectifier la trajectoire, mais un nouveau coup le transforme aussi en coquelicot sanglant.

Dégagez, attention!

La jeep vient rentrer dans un mur, et de la fumée s'échappe de son capot maintenant défoncé et plié. Je fais signe aux gars de s'occuper de la troisième jeep pendant que je m'approche et reconnais Pistolerov, mort. On l'a fait. On l'a fait ça y est. Voyant le carnage les occupants de la dernière jeep se sont arrêtés et ont levé les mains. Parfait. On a réussi. On a réussi! Mon équipe s'occupe de ligoter les prisonniers pendant que je me tourne vers Lev, et lève le pouce pour lui dire qu'il a assuré. Sauf qu'un nouveau bruit de moteur vient me faire tendre l'oreille. Un camion. Un gros camion. Quelque chose en moi me hurle que ça va mal tourner, et je hurle à Piotr et Yuri d'aller mettre les prisonniers à l'abri et qu'on se replie tous dans la maison. Grand bien m'en a pris. A peine le camion se dessine que je vois tout de suite qu'il n'est pas un camion de transport. Le convoi était aussi constitué d'un fichu camion plein d'hommes! Putain!

Je me mets à courir dans la neige, vérifiant que je ne laisse personne derrière moi, et j'ai juste le temps de pousser Vassili à l'intérieur qu'une première balle me touche au bras. C'est plus la surprise que la douleur qui me fait crier alors que je referme la porte et qu'on pousse une vieille poutre effondrée pour la bloquer. Une fois enfermés, je jette un oeil à ma blessure, mais heureusement c'est que de la chair, et la balle a fait qu'effleurer le haut de mon bras, sans entrer. Du sang, juste du sang et quelques points de suture.

Ca va sergent?
Oui oui c'est rien. Ils doivent être une trentaine dehors. On est dix de mois, et contrairement à eux, nos munitions sont comptées. Alors vous tirez pour tuer, ou les immobiliser. Soyez sûrs de vous, et gâchez aucune balle. Faites attention et prenez pas de risques inutiles. Allez on y va!


Heureusement pour nous, la première attaque s'est passée très vite, et grâce à Lev, on a utilisé très peu de munitions. Du coup on a un peu plus de chances de nous en sortir face à ce peloton d'exécution qui nous attend dehors. Je compte jusqu'à trois et je pivote, pour glisser le canon de mon arme à travers la fenêtre brisée, et me hausse à peine pour jeter un oeil. Les autres prennent leur temps malgré les balles qui filent en sifflant à nos oreilles ou qui s'écrasent avec un bruit sec contre le vieux mur de la façade. Nos coups sont rares mais précis, et je remarque aussi que des rebelles ennemis tombent tout seuls. Notre ange gardien veille sur nous, et pour ça je lui offrirai une bouteille de la meilleure vodka de Russie car sans lui...

Je sens une balle qui frappe mon casque avant d'y ricocher, et je ne peux pas m'empêcher de sourire en me disant que notre équipement joue à notre avantage. Les minutes sont longues, et nos visages commencent à se couvrir de sueur en plus de saleté. On a tué une dizaine de rebelles, mais il en reste encore vingt. Nos munitions baissent, et on ne pourra pas tenir encore très longtemps. C'est là qu'un premier cri retentit. Yuri s'effrondre en arrière en gémissant, sa main sur son oreille ensanglantée. Je rampe vers lui et le force à me regarder.

Yuri, qu'est-ce qui se passe? Qu'est-ce qui se passe? Tu es touché?

En gémissant il ôte sa main et je remarque que la moitié de son oreille a été arrachée par la balle. C'est moche mais ce n'est pas mortel. J'attrape l'infirmier et lui ordonne de s'occuper de lui pendant que je retourne à mon poste. L'odeur âcre de la poudre envahit l'air et le bruit répété des douilles qui retombent sur le sol fait presque comme une musique de carillon, semblable à ce musicien ambulant qui a un petit singe et qui joue pour amuser les enfants sur la Place Rouge. Sasha adore l'écouter... Je viens glisser un nouveau chargeur dans mon arme quand ma radio grésille. Oh non. Me dites pas qu'il a repéré un autre camion. On tiendra pas face à trente autres types armés, et les renforts mettraient trop de temps! Pourtant à l'entendre c'est pas plus rassurant. Il a été touché. Mais comment? Il était perché et bien caché! A moins que quelqu'un ait pu repérer l'origine des tirs.

Je me tourne vers Piotr et le force à se baisser, venant croiser son regard.

Je te laisse le commandement le temps que je revienne. Tiens la position et protège les autres. Je vais aller chercher Lev.
Mais Ivan c'est l'enfer là-dehors!
Il est blessé et ça a l'air sérieux. Il faut que je le ramène avant qu'ils le trouvent.
C'est de la folie!
Je laisse pas un homme derrière. Et discute pas mes ordres!


Je grimpe à l'étage au parquet branlant et avance sur la pointe des pieds jusqu'à la fenêtre la plus proche de la maison voisine. Je me glisse entre les décombres du toit effrondré, entre les restes des nids de pigeon et les graviers, et j'attends. Ils sont tous concentrés en bas. Je m'approche en rampant, toujours dans ma tenue de camouflage de neige, et décroche une grenade de ma ceinture. J'en retire la goupille et la jette par le toit défoncé jusqu'au groupe de soldats massé devant la maison. Je compte les secondes. Cinq. Quatre. Trois. Deux. Un. L'explosion fait trembler mes murs et j'entends des hurlements chez nos ennemis. Je profite du souffle pour sauter jusqu'au toit d'en face, avant de me laisser glisser sur le sol, loin des regards. Je commence à me rapprocher de la cachette de Lev, faisant attention à ne pas me faire voir, arme au poing et coeur battant. Chaque coin de maison est un danger potentiel, et je soupire à chaque fois qu'un coup d'oeil me montre que j'ai le champ libre. Trois rues. Deux rues. J'y suis. De loin je remarque un soldat qui semble monter la garde près de Lev, ou en tout cas de son perchoir. Ce crétin me tourne le dos, trop occupé à attendre que l'oiseau sorte de son nid. Je lui tire une balle dans la nuque et il s'effondre comme une poupée dont on aurait coupé les fils, son sang venant colorer la neige. J'espère que la détonation ne vas pas attirer l'attention, mais à une centaine de mètres plus loin la bataille fait encore rage. Intérieurement j'espère juste que ma grenade leur a permis de prendre l'avantage, ou en tout cas de les débarrasser d'un certain nombre de rebelles. Les chiens.

Je vérifie que personne n'arrive et me glisse à l'intérieur de son repaire. Je monte les marches poussiéreuses et j'arrive sous la trappe qui mène au grenier où il s'est réfugié.

Lev! Lev c'est moi! Je suis là pour te chercher! Descends l'échelle et je te sors de là!


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Andréas
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Andréas
Mer 16 Mai - 19:20

Mercy
Elle vient. Elle arrive pour moi, et ingrat, je montre les dents, fixant les poutres du plafond tandis que mon coeur s'affole dans ma poitrine et pompe un peu plus de sang qui s'échappe de ma plaie béante. Elle vient pour moi et je ne la remercie pas. Pour la première fois depuis bien longtemps, je refuse qu'elle vienne se glisser tout contre moi et murmure à mon oreille de douces paroles. Un son guttural m'échappe et je me crache à moitié dessus. Sur le sol et dans la flaque de sang dans laquelle je commence à baigner, je me débats et tente de me relever. Mes doigts raclement le plancher, là où mes cheveux commencent à baigner dans la flaque poisseuse qui s'étend sous moi. Le liquide vermillon est chaud et comme du sirop, se glissant sur le bois poussiéreux tandis qu'au-dehors, la bataille gronde sans moi. Je tente de me relever mais la douleur dans mon épaule me colle au sol et me fait  gémir comme un animal blessé. Ça ne devrait pas m'arriver. Ça n'aurait jamais dû arriver. Jamais. Je suis l'ombre, le bon petit soldat de la Faucheuse qui se glisse dans les pas des hommes qui doivent bientôt passer de vie à trépas. Personne ne devrait être capable de me voir ou de me trouver…. Je suis celui qui n'a pas de nom, pas d'existence propre… Je suis celui qui se drape des ténèbres.

Je bats des cils et lentement je sens mon souffle se faire plus court. Dix minutes. Je n'ai peut-être que ça, et encore. Je sens que la balle est toujours dans mon épaule. Je sens le métal encore chaud cautériser ma chair alors que mon corps peine à entamer un processus de cicatrisation. Pire, je sens que le froid n'arrive pas à faire geler mon hémoglobine, et que mes vêtements n'épongent que dalle. Comme un mouton qu'on vient d'égorger, je laisse mon sang se répandre sur le sol et impuissant je grogne, cherchant une échappatoire à une situation qui ne semble en avoir. Mon souffle devient buée quand il traverse mes lèvres et je sens le bout de mes doigts geler. Ça y est. Je commence à refroidir. Dans pas bien longtemps j'aurais mal au coeur, je m'engourdirais et ma vue va se troubler. Je déglutis une fois de plus, tentant de refouler l'espèce de sanglot qui semble vouloir quitter ma gorge nouée. Je ne veux pas mourir, pas encore, pas tout de suite. Je ne peux pas mourir… Ça n'arrive qu'aux autres et pas à moi. Ce sont les mortels qui y passent, pas moi. Je suis plus qu'un être de chair et de sang, je suis un émissaire d'une puissance plus grande que tout ça. Danse devant mes yeux des taches sombres, pareilles à de la cendre et sur mes lèvres, je goûte à la suie et la poudre. Je tousse une fois de plus et crache un peu de bave qui se répand la fourrure qui composait le col de mon manteau.

"Non… Non…"

Tu entends ? Tu entends ma belle ? Ce n'est pas encore l'heure pour nous de nous étreindre. Tu m'avais promis plus… Tu m'avais promis tant. Jamais tu n'avais parlé d'éternité, mais tu me disais que je ne serais jamais celui qui tomberait au combat. Mes ongles s'enfoncent dans le bois alors que je sombre dans le coton. Lentement je perds l'ouïe et tout ne devient qu'un long sifflement strident. Ça y est. Je n'ai plus que deux, voir trois minutes avant l'inconscience. Après ce sera trop tard. L'infirmier arrivera simplement pour constater mon décès et demander aux autres de transporter mon corps jusqu'au camp. Et là…. Là je ne veux pas y penser. Je ne veux même pas imaginer qu'on va me foutre dans une boîte en bois qu'on enfouira dans la terre pour l'éternité à venir. Je ne veux pas imaginer la plaque en marbre qui portera mon prénom et l'absence de gens autour de cette commémoration ridicule de l'être que j'ai été. Non, tout ça c'est bon pour les autres. Pour ceux qui doivent un jour mourir. Mon sang chaud vient caresser ma nuque et furieux, je pousse un cri, faisant claquer mes dents dans l'air froid. Mon souffle se fait encore plus court et la tête me tourne. Non. Je refuse d'abandonner, je refuse de me laisser aller. Je ne suis pas ainsi. Et pourtant, plus je bats des cils, plus ça devient compliqué de rouvrir les yeux. C'est dur, c'est lourd. J'écoute les battements de mon coeur ralentir et mon souffle devenir la seule chose que j'entends, jusqu'à ce que sa voix me parvienne. D'un coup je rouvre les yeux et si au début les mots n'avaient aucun sens, ils finissent par en avoir un. Il vient me chercher. Il est là, le héros qui a causé ma perte.

"Fils de…."

Je serre les dents et grogne à nouveau alors qu'une espèce de rage de vaincre gronde désormais en mon être. C'est de sa faute. C'est lui. Lui qui a révélé ma position à l'ennemi. Lui qui par son incompétence m'a donné aux autres. Lui a qui je dois la balle dans mon épaule et mon sang sur le plancher. J'entends sa voix et j'arrive en un hurlement à me remettre sur le ventre, rampant comme je le peux avec l'envie de lui faire la peau. Mes ongles se plantent dans le bois et le souffle court, je ne pense qu'à lui coller entre les deux yeux la même balle qui actuellement dévore ma chair.

"Je vais te crever… Je vais te crever…"

Voilà ce que je murmure tandis que je rampe jusqu'à la trappe. Je vais le tuer. Je vais lui faire regretter de m'avoir fait repérer. Je vais lui apprendre ce que coûte son incompétence.

"Fils de pute… J'aurais ta peau…"

Je montre une fois de plus les crocs et je commence à vouloir ouvrir cette trappe, n'arrivant qu'à m'arracher d'autres hurlements qui sonnent bien trop comme des sanglots. La douleur est telle que je vois des étoiles mais n'arrête pas. Mes doigts se glissent sous la trappe et finalement, je parviens à l'ouvrir, me laissant ensuite retomber sur le sol bien lourdement. Mon bras blessé pend dans le vide et un gémissement douloureux m'échappe. Je peine à entrouvrir les lèvres. J'ai envie de vomir. Je peine à sentir mon épaule. Le sang goutte au bout de mes doigts et mes cheveux collent à mon visage. Je cligne des yeux et gronde une dernière fois, entendant des pas au loin. Ça doit être elle… Elle qui vient pour moi. Le monde tourne autour de moi et je ferme les yeux. Les trois minutes sont passées. Maintenant j'en ai cinq d'inconsciences avant le Jugement dernier. Si j'ai une prière à faire, c'est maintenant ou jamais.©️ 2981 12289 0
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Andréas
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Andréas
Mer 16 Mai - 19:20
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Lev Baranov
« Mercy »
Lev & Ivan
Notre avantage. Notre seul avantage est qu'ils soient bien moins armés et équipés que nous. C'est grâce à ça que j'ai pu quitter le bâtiment à moitié en ruines et qu'on a pu survivre, tout simplement. Eux n'ont pas de grenades. Eux n'ont pas de casques. Ils se battant avec de vieilles kalachnikov qui datent encore de la guerre froide, des bottes de caoutchouc aux pieds ou de vieilles baskets. Et aucun d'entre eux n'a de gilet par balle. Nous avons le meilleur équipement, et nous sommes entraînés. C'est ce que je me dis en sentant mon casque qui m'a protégé, évitant de faire de Valli une veuve ou de Sasha un orphelin. C'est ce que je me dis alors que je décroche la grenade de ma ceinture alors que je suis perché sur ce toit branlant, retenant mon souffle, et avançant du bout du pied comme une ballerine, craignant que le parquet vermoulu ne s'effondre sous mon poids. C'est ce que je me dis alors que je garde la goupille dans ma main sale et rougie de sang, avant de la jeter par le toit défoncé. Et au moment où la déflagration retentit, faisant trembler les murs et ébranlant la bâtisse toute entière, j'en profite pour sauter sur le toit d'en face. Je me suis offert quelques secondes de diversion et je leur ai offert un avantage. J'entends des cris, des gémissements, des ordres, et quelques coups de feu résonnent encore dans l'air glacé alors que je poursuis ma mission seul, pour récupérer Baranov.

Par chance je me retrouve seul, tous les habitants se sont sagement terré chez eux ou on fui cette région il y a bien longtemps, et comme je les comprends. Personne n'aime vivre au milieu du chaos et de la désolation, à part peut-être le type que je vais chercher, justement. Je marche sur la pointe des pieds, me faufilant entre les maisons où j'entends parfois des sanglots, des paroles rassurantes ou encore des prières. Dans d'autres, c'est la télé ou la radio qui crachotent, comme pour faire taire la fureur qu'il y a à quelques mètres d'eux, comme pour oublier le fait que c'est tout près, et qu'il ne suffirait que de tendre la main pour sentir le souffle des balles. Je tue rapidement la sentinelle qu'ils avaient placée en bas d'un coup sec, et après plusieurs secondes, quand je vois que personne ne vient, je soupire de soulagement et traine le cadavre un peu plus loin, derrière un mur. J'attrape ensuite une brassée de neige que je dépose sur la flaque de sang encore chaud, encore une fois pour ne pas éveiller l'attention. C'est seulement une fois mes arrières couverts que je rentre dans la vieille baraque et que je grimpe dans les étages, jusqu'à son repaire. Je sais même pas précisément où il est, je sais juste qu'il s'est installé dans un des points les plus hauts qui donne sur la zone de tir.

Je me plante sous la trappe donnant au dernier étage, après avoir inspecté les autres pièces une à une. Il est là. Il peut être que là. Pas d'autre possibilité. Je toque du bout de mon canon contre le bois poussiéreux, et j'entends des grognements en guise de réponse. Bien. Au moins il est encore en vie, et conscient. J'entends qu'il rampe vers moi et j'attends, guettant nerveusement les alentours et jetant des coups d'oeil par la fenêtre brisée pour vérifier que personne ne vient. Heureusement non. Je suis seul.

Allez Lev ouvre putain! Il faut que je te sorte de là!

Je l'entends hurler comme un chien à l'agonie alors qu'un rai de lumière se glisse au-dessus de ma tête. Puis bientôt la trappe s'ouvre, retombant sur le plancher du grenier dans un bruit sec, avec une envolée de paille et de plumes de pigeon. Nouveaux grognements. Il est pas en état de m'aider ou de me tendre une échelle. Tant pis. Je recule de quelques pas, saute et arrive à attraper le rebord de la trappe. Je me hisse, mettant un genou à terre avant de m'accroupir, et c'est seulement là que je le vois. Le regard paniqué, le teint pâle, et surtout, une foutue tache de sang qui s'étale sur le sol pourri. Putain. Putain ils l'ont pas raté.

C'est bon, c'est bon je vais te tirer de là.

Je me penche pour l'examiner, et je commence à me mettre à genoux, pour le prendre sur mes épaules. Mais à peine j'ai voulu le hisser qu'il hurle de plus belle, et que je sens son sang chaud et poisseux sous mes doigts. Putain. Il saigne beaucoup trop. Il saigne beaucoup trop et il va se vider, surtout si je le trimballe à travers une maison à moitié détruite. Réfléchis. Réfléchis Ivan. Réfléchis! Il faut cautériser la plaie. Il faut que je l'empêche de saigner. J'observe autour de moi et remarque son sniper, sagement installé sur son trépied, visant au loin. Les balles. Les balles! Dans les balles il y a de la poudre. La poudre brule! Je repose Lev et rampe pour vider son chargeur, et ouvre une balle avec les dents. Je reviens ensuite près de lui et commence à le deshabiller pour dégager son épaule et sa plaie. Putain ça saigne beaucoup. Je verse la poudre sur sa plaie et croise son regard.

Ok. Tu vas me détester mais ça va te faire un mal de chien. Mords ça.

Je lui fourre le manche de mon couteau de chasse entre les dents et sors mon briquet. Sans lui laisser le choix j'approche la flamme du petit tas de poudre qui s'embrase rapidement, faisant une petite gerbe de fumée et une odeur de soufre. Avant que ça ne commence à sentir le cochon brûlé. Je maintiens Lev allongé du mieux que je peux alors que je vois la masse de poudre se consumer petit à petit jusqu'à ne faire qu'une croute noirâtre. Mais sèche. L'infirmier se chargera du reste, mais comme ça il arrête de saigner. Je reviens près de lui et range mon couteau avant de m'agenouiller pour le prendre sur mes épaules. Mais chaque mouvement que je fais envers lui le fait gémir. J'hésite et le repose une dernière fois.

Pardon mon frère. J'ai pas le choix.

J'inspire et lui décroche une belle droite qui le met au tapis. Bien. Maintenant je peux y aller. Je le glisse sur mes épaules alors que je m'assieds sur le rebord de la trappe, et je me laisse retomber. Je serre les dents quand j'atterris maladroitement, un genou à terre, mais toujours intact à part ma cheville qui me lance. On s'en fout. Je guette, mais toujours rien. Il y a toujours des tirs, mais ce n'est pas ici. Pas tout près. On est tranquilles, enfin encore un peu. Je me redresse et commence à redescendre, faisant gaffe à ce que le vieil escalier ne cède pas sous notre poids. Puis je refais le chemin inverse. Caché derrière la maison à côté de son perchoir, je sors ma radio et murmure.

J'ai Lev. On arrive. Libérez nous la voie!
A vos ordres chef. Il en reste plus que quatre, mais on a un homme à terre.
Qui?
Piotr. Il s'en remettra.
Dépêchez vous.


Je reprends ma marche lourde, me glissant au maximum derrière les maisons et les jardins pour m'approcher de notre refuge. Des cris. Des coups de feu. L'odeur de la poudre, encore, et les détonations sèches. Quand je m'approche je vois juste trois assaillants cachés derrière des fenêtres ou sur les toits, et j'assiste à l'un d'entre eux qui tombe. Plus que deux. En voyant leur débâcle, je les vois qui reculent et disparaissent dans les petites rues désertes. On n'a pas le temps de les chercher. Maintenant que la voie est libre, je hurle à mes hommes.

Ramassez les blessés. Qu'un type valide ramène le camion, on aura plus de place. Allez!

La majorité reste en couverture pendant que deux types courent démarrer le camion, dans un silence étrangement calme. Bientôt la vieille bête de métal s'approche de la baraque.

Infirmier, tu grimpes là-dedans et tu t'occupes d'eux. Surtout lui. Il a besoin de soins urgents. Youri tu viens et tu m'aides à le monter à l'arrière!

Il arrive et obéit. A deux on l'allonge sur le sol du camion, et j'ôte ma veste pour la mettre sous sa tête. Je redescends pour superviser l'évacuation, et par chance on s'en sort sans trop de mal. Aucun mort, quelques blessés. Et celui qui m'inquiète le plus est Lev. Il a perdu beaucoup de sang. Une fois tous dans le camion, l'infirmier s'occupe de Lev alors que le moteur asthmatique fait avancer notre véhicule, qui s'éloigne de ce patelin de malheur. Les prisonniers sont contre la cabine du pilote, sous bonne garde.

Il saignait énormément, alors j'ai cautérisé sa plaie en versant de la poudre et en y mettant le feu.
Mais c'est...c'est dingue!
Pardon mais j'avais pas de sacoche de médecin sous la main, ni de bloc opératoire!
Non mais...C'est pas... enfin c'est pas ce que je voulais dire sergent. Juste... je vais le stabiliser et lui coller une dose d'antibio à faire tomber un cheval.
Bien, fais ça.


Je me rassieds ensuite sur la banquette et soupire lourdement, fermant les yeux.


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Andréas
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Andréas
Mer 16 Mai - 19:21

Mercy
Je vais le tuer. Je vais sincèrement le tuer. Je vais crever cet enfoiré et accrocher sa tête au mur de mon appartement tandis que le reste de sa carcasse servira à nourrir les corbeaux du coin. Je vais faire de ce connard incapable de ne pas révéler la position de son sniper mon nouveau tapis. Je vais me faire un plaisir monumental de l'égorger et de contempler les gerbes de sang qui s'échapperont de sa gorge alors que ses derniers mots seront sûrement des gargouillis répugnants. Oh je jure que j'y prendrais mon pied, que je vais adorer ça et que mes derniers hommages pour lui seront un mollard que je viendrais lui cracher au visage. Voilà tout ce que t'auras connard quand je t'aurais mis la main dessus : mon mépris et une mort à peine propre. T'auras que ça. En bas j'entends qu'il tourne en rond, cherchant sûrement comment grimper alors que je suis là à baver sur le plancher couvert de mon sang. C'est ça, prends ton temps… Laisse-moi le temps de me préparer pour te faire la peau. Mon coeur commence à battre à mes oreilles et allongé sur le dos, à contempler les poutres mangées par le temps et le givre, je sens lentement l'engourdissement gagner mon corps qui se fatigue bien plus vite que mon esprit. Le temps d'un battement de paupières, j'écoute ma respiration sifflante, comptant les secondes qui me restent avant que je ne commence à avoir le vertige. Le temps d'un battement de coeur, je réfléchis et je tente d'analyser la situation. Une balle. Mon épaule gauche. Et une douleur qui me ferait presque désirer la mort. Ivan en bas qui veut me sauver. Je rouvre les yeux et laisse à nouveau un peu de salive glisser d'entre mes lèvres. Ce n'est rien. Tout ça n'est rien. Juste un contretemps qui ne sera pas éternel. Une simple remise à plus tard de ma mission. À la manière d'un chat, je l'entends bondir à mes côtés et quand il se penche vers moi, ce sont mes prunelles haineuses qui viennent chercher les siennes. Regarde. Regarde ce que tu m'as fait connard. Tout est de ta faute. Je montre les crocs dans le vide et si j'essaye de parler, tout ce qui m'échappe ce sont des sons gutturaux qui auraient pu être des mots. Je vais t'arracher les yeux et la langue… Je vais me faire un plaisir de te débiter et de plonger mes mains dans tes tripes… Je vais te rendre au quintuplé la souffrance qui actuellement me donne envie de gerber. Quand il se penche pour m'examiner, j'ai envie de tendre la main vers lui et de lacérer la peau de son visage, j'ai envie de lui crever mais je ne sais rien faire à part serrer les dents et hurler quand il essaye de me soulever. Quelque chose de l'ordre d'une plainte m'échappe ensuite et le souffle de plus en plus court, je peine à l'insulter.

"Co… Connard…"


Je commence à avoir du mal à garder les yeux ouverts. Je commence à être faible. Je tente de fermer les poings mais je sens que c'est compliqué, voir trop demandé à mon corps. J'entends Ivan parler mais je ne comprends pas le sens de ses mots. Fais-chier. Je suis en train de sombrer. Mon esprit lui aussi commence à s'engourdir et j'ai l'impression d'être diminué, presque handicapé. Je hais ça. T'entends ? Je hais ça. Voilà ce que j'aimerais hurler alors qu'il m'abandonne, allant pour une raison qui m'échappe attraper mon fusil. Je gronde comme animal quand il pose ses doigts dessus, ne supportant pas qu'il puisse toucher ce qui est à moi. Touche-pas putain…  Le chargeur se vide à ses pieds et les balles qui tombent au sol me semblent être des carillons qui chantonnent dans le vent. Je déglutis pour la première fois depuis ce qui me semble être une éternité et c'est quand il revient vers moi avec l'une d'entre elles que je comprends ce qu'il va faire.

"Non…"

Je peine à articuler, à desserrer les lèvres et voilà que lui me déshabille, déchirant une partie de ma veste pour dévoiler ma blessure. Je tente de remuer, en vain.

"N…n"


Je n'émets plus que des sons, là où lui ouvre la balle et en répand la poudre sur ma blessure. Dans un dernier effort je fais claquer mes dents, ne récoltant alors que le manche de son couteau de chasse. Mes canines se plantent dans le cuir de celui-ci, alors que l'écume au coin des lèvres, je continue de me débattre, refusant qu'il me cautérise comme si j'étais un animal. Mais c'est trop tard. Son briquet émet un cliquetis que je ne connais trop bien et ensuite… Ensuite c'est tout mon corps qui s'arque alors que je hurle à la mort. Une douleur vive, presque étourdissante fait remonter de la bile dans ma gorge tandis que des tremblements puissants semblent me faire convulser… Tout ça me donne l'impression de durer une éternité et pourtant tout n'est qu'un flash douloureux qui ne dure qu'un instant. Il me retire le couteau de la bouche et à nouveau je crache, trop abasourdi par la douleur pour l'insulter ou bouger… Non, là tout ce qui compte pour moi en cet instant, c'est de ne pas vomir ou m'évanouir… Je m'empêche ainsi de cligner des yeux ou de respirer trop profondément, évitant le moindre geste qui pourrait réveiller une autre douleur. Je reste étrangement silencieux et immobile, ne brisant cet était végétatif que lorsqu'il vient me traîner, m'arrachant de ce fait des gémissements digne d'un animal en train de crever. J'ai envie de lui dire d'arrêter mais rien d'autre que des sons plaintifs ne veulent sortir d'entre mes lèvres. Une torture affreuse qui ne prend réellement fin que lorsqu'il me pose enfin. Un soupir glisse d'entre mes lèvres et si je me dis simplement que tout va prendre fin, je ne rouvre les yeux que pour voir son poing s'écraser sur ma tempe, m'assommant pour de bon.

C'est un son désagréable qui me fait revenir à moi. Un son strident qui n'a rien à faire là. Un son qui s'accompagne de mains douces qui s'égarent par instant sur ma peau. Un grognement m'échappe tandis qu'autour de moi le monde se recompose, devenant un ensemble de bruits et d'odeurs qui semblent m'agresser. Entre les machines, la respiration de la femme, l'odeur du désinfectant et du sang… Je peine à ne pas comprendre où je me trouve. Brutalement j'ouvre les yeux et mes pires craintes se retrouvent être confirmées. Avec un grognement je découvre la chambre et furieux je croise le regard de l'infirmière qui ne s'attendait pas à ce que je revienne de parmi les morts aussi vite. Celle-ci cesse ce qu'elle était en train de faire, suspendant de ce fait son geste de changer mon pansement alors que lentement, je tente de retrouver le fil des évènements qui m'ont conduits jusqu'ici. Lentement la femme d'un certain âge reprend son travail, terminant de fixer mon bandage tandis que d'une voix dure et rauque, je pose la seule question qui a du sens.

"Depuis combien de temps ?"

Demander où suis-je serait une perte de temps, tout comme celle de demander comment je me retrouvé ici. Les réponses sont simples…. Évidentes même. Ivan m'a amené ici… Dans ce mouroir dans lequel je n'ai pas ma place. L'infirmière me regarde sans vouloir comprendre. Bien. Moi qui voulait être raisonnable pour une fois. J'attrape sa main et la serre entre mes doigts, lui arrachant un hoquet de surprise qui est rapidement étouffé par le grognement presque bestial qui remonte des tréfonds de ma cage thoracique.

"Combien. De. Temps ?"

Cette fois-ci je montre les crocs, retroussant les lèvres, lui arrachant un simple cri alarmé. Soucieux de ne pas voir la sécurité débarquer, je me lève, ne me souciant pas d'arracher au passage mes perfusions, me contentant alors de simplement l'assommer contre l'un des murs, laissant son corps inconscient retomber lourdement au sol. Le souffle court, je prends le temps de faire taire le vertige qui me saisit, défaisant au passage les tuyaux qui pouvaient encore me lier de force à ce lit. Et enfin libre, j'entame ma marche vengeresse, sachant déjà qui sera le premier à tomber sous mes coups : Ivan. L'enfoiré qui a faillit me tuer. Lui qui m'a ensuite fait rôtir la chair comme si je n'étais qu'un cochon de lait, lui qui a sûrement du passer pour un héros alors que tout était de sa faute. Je pousse la porte de ma chambre et commence à remonter le couloir, me foutant de savoir que je peux avoir le cul ou le dos à l'air. Non, tout ce qui compte, c'est de sortir d'ici et ensuite… Ensuite… Je me fige en le reconnaissant au bout du couloir. Je m'immobilise en voyant sa carrure impressionnante et sur son visage presque angélique un étonnement qui n'a rien de feint.

"Fils de pute…"

Je serre les poings et m'approche, sincèrement prêt à le tuer dans cet hôpital.

"Je vais te faire la peau ! C'est ta putain de faute ! Tout est de ta faute ! C'est ta tête que j'aurais dû exploser d'une balle !"

L'écume aux lèvres je hurle pour lui, rameutant de ce fait une partie du personnel hospitalier.©️ 2981 12289 0
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Andréas
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Andréas
Mer 16 Mai - 19:21
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Lev Baranov
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Lev & Ivan
Le trajet est long, et nous sommes tous épuisés. Ils se sont battus comme des lions et là ils relâchent enfin la pression. La peur les quitte comme une amante délaissée qui s'en va chercher quelqu'un d'autre à étreindre alors que la fatigue la remplace, les caressant tendrement. Et je les encourage à se laisser aller entre ses bras. Maintenant il ne nous arrivera plus rien. Bientôt nous retournerons dans la zone sécurisée et on sera hors de danger. On confiera les prisonniers aux services spéciaux et on aura droit à quelques jours de repos, voire même une permission pour avoir accompli notre mission. En les voyant tous, les yeux mi-clos, le visage couvert de boue, de sang et de poudre, je sais qu'ils pensent la même chose que moi. La maison. Ils repensent à leurs familles, leurs parents, leurs femmes, leurs gosses. Et j'avoue être heureux de pouvoir appeler Valli bientôt, d'entendre sa douce voix au téléphone et de lui dire que je vais bien. Puis, si Sasha est encore debout, je lui parlerai aussi, même s'il commence tout juste à comprendre ce qu'est un téléphone. Je les regarde et je me sens en paix. Les choses auraient pu être pires, mais je les ramène tous à la maison. Pas en un seul morceau, parce que c'est quand même la guerre, et il ne faut pas espérer revenir de ça comme si on était allé faire une promenade en forêt, mais ils sont tous là. Tous pourront revoir leurs enfants, les appeler bientôt et les rassurer. Personne ne va pleurer ce soir, et il n'y aura pas de nouveau nom à ajouter sur une pierre tombale ou à la liste des veuves de guerre. Je les ai ramenés.

Au bout de quelques kilomètres je me penche vers l'infirmier et touche son épaule de mes doigts sales.

Alors? Il va s'en sortir?
Oui sergent. Il va falloir l'opérer pour extraire la balle et autres, mais il est stable. C'est un battant. S'il a des soins bientôt il s'en remettra.
Parfait. Veille sur lui.


Je me rassieds, plus profondément, et ferme les yeux, bercé par les cahots du camion sur le chemin de terre défoncé qu'on emprunte pour se tirer de là. Puis je finis par m'endormir. Je me réveille quand on s'arrête dans la cour de la caserne, et une nuée de monde s'approche de nous. On emmène les gars en fonction de leur état, au débrief ou à l'infirmerie, et pendant ce temps je supervise les opérations, m'assurant que tout le monde est traité comme il faut. C'est seulement à ce moment que je file moi-aussi à l'infirmerie. Enfin, on m'ordonne d'y aller, et j'obéis. Quelques points de suture mais rien de plus. Mon officier supérieur me fait ensuite demander et je le suis dans son bureau. Je lui raconte précisément et rapidement toute l'opération, n'oubliant aucun détail. Le diable s'y cache, comme disait ma mère. Au bout d'une heure, il me fait signe que je peux y aller, et je retourne à ma chambre, privilège de sergent. J'appelle rapidement Valli, comme promis, et lui assure que je la rappellerai plus longuement le lendemain. Je prends un long bain brûlant, enfile des vêtements propres et m'écroule pour une longue nuit de sommeil.

Dès le lendemain je vais prendre des nouvelles de mes blessés après un petit déjeuner au mess où je reçois des compliments de la part de tout l'état-major. Je mentirai en disant que je ne suis pas flatté, mais j'insiste sur le fait que je n'aurais rien pu faire sans mes hommes, et que j'ai dans les mains une équipe de soldats d'élite. Sans eux rien n'aurait été possible. Pourtant le général me dit que mon coup d'éclat ne restera pas sans conséquences, et que le Kremlin en aura vent. Eh bien... Pas vraiment à l'aise, je termine mon repas et file prendre des nouvelles de mes rescapés. Piotr est déjà réveillé, et me sourit dans son lit, la cuisse bandée soigneusement. Je discute avec lui, puis avec Yuri, dont la tête est empaquetée dans des bandes à cause de son oreille endommagée mais pas arrachée. Tant mieux pour lui. Je fais examiner mes sutures avant de faire un crochet pour aller voir Lev, le plus durement touché. Et avant même d'avoir besoin de chercher sa chambre j'entends des cris et des éclats de voix. Puis la porte qui s'ouvre à la volée, et je suis surpris de voir un Lev en chemise d'hôpital qui en sort, passablement furieux. Son regard fou se pose sur moi, et je vois ses mâchoires et ses poings se serrer alors qu'il vient vers moi, me chargeant comme un taureau furieux.

Comme un idiot je reste planté là, sans comprendre pourquoi il semble si furieux contre moi. Je l'entends hurler, me traitant de tous les noms, avant de m'accuser pour ce qui lui est arrivé. Non mais qu'est-ce qu'il lui arrive? Qu'est-ce qui est en train de se passer dans son crâne? Sincèrement? On dirait qu'il a été blessé plus salement que je ne l'aurais cru. Et quand je vois qu'il continue à me hurler dessus, et qu'il a l'air bien décidé à me faire payer quelque chose que je ne comprends pas. Sans réfléchir, et pour calmer un peu le jeu, je le saisis par son bras valide et lui fais une clé de bras pour le plaquer contre le mur, le visage appuyé contre le béton.

Tout d'abord tu vas changer de ton, surtout quand tu t'adresses à ton supérieur! Je suis ton sergent, l'oublie pas. Ensuite tu vas surveiller ton langage Lev! Je te permets pas de m'insulter, surtout pas devant la moitié de l'hôpital.

J'essaie d'être calme mais l'entendre m'insulter et s'énerver sans que je comprenne pourquoi m'a fait monter la moutarde au nez. Puis, sans lui laisser le temps de reprendre, je le pousse dans une chambre vide et referme la porte, le dominant de toute ma hauteur.

Et maintenant tu vas me dire ce qui se passe?


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Andréas
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Andréas
Mer 16 Mai - 19:21

Mercy
Je vais le tuer. De son visage angélique il ne restera rien une fois que je me serais occupé de lui. Sa femme ne pourra le reconnaître et quand on le mettra en terre, il ne sera rien de plus qu'un amas de chair sanguinolent, des restes d'un humain qui était autrefois beau et vivant. Un cadavre qui portera mon nom. Lev lira-t-on dans ses blessures et ses pupilles vitreuses. Je retrousse un peu plus les lèvres, lui montrant de ce fait mes canines, comme pour l'avertir de la morsure à venir. Le sergent chéri va périr. Il sera ma proie, ma victime… Ma chose. Son corps sera mien et je ne me gênerais pas pour lui faire perdre cette beauté que les autres osent appeler un charisme naturel. Ils verront ce que je vais en faire de cet homme qui se pense être bon et vertueux. Ils verront ce que le soldat de la Faucheuse fait des hommes. Mes doigts se crispent un peu plus sur son col alors que je lui souffle au visage mon haleine d'homme hospitalisé, ne pensant pas une seconde à mes points qui pourraient à lâcher ou à lui qui pourrait se défendre. Non, je ne le pense pas être capable de me faire une clé de bras pour m'immobiliser, ni être capable de me plaquer comme le mur comme si je n'étais qu'une recrue qu'il s'apprête à humilier. Aveuglé par la colère, je ne vois pas ça et me trouve pourtant à devoir subir tout ça, terminant la joue plaquée contre le mur en béton. Un grondement m'échappe, devenant rapidement hurlement lorsque je le sens se presser contre mon dos. Moins de colère que de peur je me débats, écoutant à peine son discours moralisateur tant je suis perdu dans des souvenirs anciens. Je tente de me débattre, en vain. Il est comme mon père. Il a sa force. Il a sa colère. Il a sa voix. Je hurle à nouveau, me refusant de pleurer. Je ne suis plus un enfant. Je n'ai plus à subir. Je suis un homme, un tueur. Il ne peut rien contre moi. Mon coeur cogne violemment contre ma poitrine et du coin de l'oeil, je tente de croiser son regard. Il n'est pas lui. Il a peur. Il n'est pas mon père. Il n'osera jamais lever la main contre moi. Ivan est faible. Les hurlements que je poussais deviennent grondements et ceux-ci se muent en un rire qui devient insulte. La peur devient moquerie. L'enfant battu devient la Faucheuse, en une étrange métamorphose.

"T'es un homme mort Oblonski…"

Son nom de famille meurt dans un gloussement rauque alors qu'il m'arrache de ce mur, me jetant de force dans une chambre vide qui je suppose va devenir notre arène pour le combat à venir. Un son rauque remonte de ma poitrine jusqu'à ma gorge et quand enfin la porte est claqué dans son dos, je me tourne vers lui, ayant désormais un rictus mauvais là où avant je retroussais les babines comme un chien enragé. Mon sergent ose demander des explications et pour seule réponse je ne lui offre qu'un grognement.

"Ce qui se passe ? C'est que je vais te tuer."


Mon regard froid se plante dans ses prunelles alors que je me redresse, réfléchissant déjà à la façon dont je lui ôterais la vie. La balle dans la tête serait le plus simple, le plus rapide aussi. Mais il n'y aurait pas le plaisir de sentir son sang sur mes doigts, ni celui de voir son corps lutter pour survivre. Ce ne serait pas intime, pas assez organique. Je ne veux pas qu'il ait une mort propre. Je veux qu'elle soit dégueulasse, à l'image même de mon âme. Je veux que ce soit violent, sanguinolent et charnel. Je veux pouvoir sentir sa peau se refroidir contre la mienne, son souffle caresser une dernière fois sa peau alors qu'il enfoncerait ses ongles dans ma chair, ses prunelles elles racontant les supplications et les prières qu'il se murmurait. Je veux tout ça pour nous deux, je veux qu'il y passe comme un chien. Je ne veux pas qu'il y ait la moindre beauté ou grâce dans sa mort. Je veux lui rappeler qu'il n'est rien, même pas mon supérieur. Il n'est rien. Juste Ivan. Juste mon putain de sergent qui pense que tout le monde l'aime et a envie de lui lécher le cul.

"Je vais te faire regretter de m'avoir touché et maîtrisé, je vais te faire payer ton incompétence et ton arrogance. Je vais te faire la peau, Ivan et je vais tellement bien le faire que ta précieuse et charmante épouse sera même pas capable d'identifier ton cadavre. Je vais te faire payer ton incompétence et ton talent à ramasser la gloire des autres."

J'avance vers lui, oubliant la douleur de mon épaule gauche, les points qui me supplient de retourner m'allonger et mon souffle court. Je fais un pas, puis deux, fantasmant déjà de son sang qui pourrait perler sur sa peau, de ses cheveux que je pourrais couper ou de cette barbe que je pourrais souiller. Je pense à toutes les offenses que je pourrais faire et à tout ce que je pourrais retirer à sa femme. L'idée de faire couler son sang fait vibrer en moi quelque chose. Je viens me planter face à lui, levant légèrement les yeux non pas pour croiser son regard, mais pour observer ses lèvres que je pourrais arracher d'un coup de dents. Elles manqueraient à ta femme, pas vrai ?

"C'est de ta putain de faute si je me retrouve dans ce mouroir de merde avec les autres. C'est toi qui dans un geste complètement idiot m'a livré aux ennemis qui n'ont eu alors qu'à se servir de moi comme cible d'entraînement… Ils auraient pu me tuer simplement parce que tu es négligent et le pire dans tout ça… C'est que c'est toi, le sergent, qui va tirer toute la gloire de mon acte. C'est moi qui ait abattu  ce chien et pourtant, c'est sûrement toi qu'on va décorer… Je suis sûr que tout le Kremlin est déjà à genoux pour te sucer la queue… Tu vas sûrement avoir une médaille… Pour ma proie. C'est ma victime, pas la tienne. Et rien que pour ça, je vais me faire un plaisir de te faire la peau."©️ 2981 12289 0
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Andréas
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Andréas
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Lev Baranov
« Mercy »
Lev & Ivan
Encore une fois, sous mes yeux, j'ai la preuve qu'il est imprévisible et que dans sa tête s'agitent des eaux qui sont bien noires et épaisses. Il est là, au beau milieu du couloir, à hurler et à tenir des propos qui n'ont pas de sens, à asséner des reproches qui n'en ont pas beaucoup plus, s'attaquant aux infirmières effrayées qui tentent tant bien que mal de raisonner le colosse qui se promène les fesses à l'air devant tout le monde. S'il y en a bien un qui n'est pas pudique...C'est bien lui. Elles sont deux, puis trois petits bouts de femmes en uniformes sages et bien repassés, qui se retrouvent en face à l'ours mal léché qu'il interprète magnifiquement bien à cet instant. Lev dans toute sa splendeur... Mais la seule chose que je n'ai pas l'air de comprendre, c'est tout simplement pourquoi. La raison pour laquelle il est en train de hurler sur ces pauvres filles qui le regardent avec des yeux paniqués, alors que d'autres arrivent.

Et...à peine il m'a vu qu'il détourne sa colère d'elles, pour la passer sur moi. De l'autre bout du couloir il me hurle dessus, avant de marcher vers moi d'un pas lourd et...clairement décidé. Une locomotive en marche, et je jurerais presque voir de la fumée sortir de ses narines. La première insulte fuse, et j'ai déjà remarqué ses poings serrés depuis qu'il m'a vu. Sa colère est loin de retomber, et la dernière chose que je veux, c'est provoquer un esclandre. Alors je l'attrape par le bras, d'abord pour l'empêcher de me frapper, et essayer de calmer ses ardeurs en l'immobilisant contre le mur. Mais c'est loin de l'apaiser, et comme il peut pas me toucher, ses hurlements redoublent, résonnant sûrement dans tout l'étage. Putain... à le voir comme ça, je me dis que jamais je ne le comprendrai. Jamais j'arriverais à savoir ce qui se passe dans sa tête, ou comment son cerveau fonctionne. C'est un foutrement bon sniper, le meilleur que j'aie croisé, mais il a ce côté chien fou qui parfois me fout les jetons.

Le fait est que pour l'instant, il nous fait une crise plutôt explosive, et la seule façon que je trouve pour limiter la casse c'est de le pousser dans une chambre heureusement vide. Là il ne risque de blesser ou d'insulter personne à part moi, et je suis celui qui a le plus de chances de s'en sortir, et surtout, d'arriver à le maîtriser si ça s'arrange pas, pas comme ces petites tourterelles qui n'auraient jamais fait le poids contre lui. La porte se referme, et à le voir comme ça, j'ai presque l'impression de me retrouver dans un ring de boxe... ou tout du moins l'endroit où on va régler les comptes qui devront l'être, d'après lui...

Et je peux savoir pourquoi tu me veux mort Baranov?

Je hausse un sourcil alors que je l'écoute continuer à balancer des menaces, répétant encore une fois qu'il va me tuer et que je vais y passer. Quelque chose de mauvais passe dans ses yeux, une lueur malsaine, alors qu'il me contemple, brusquement silencieux quelques secondes. Avant que sa rage n'explose à nouveau, comme un volcan entre deux irruptions. Encore une fois je l'écoute sans piger un traitre mot de ce qu'il me balance au visage, et la seule conclusion à laquelle j'arrive, c'est que j'aime pas ça du tout. Mais alors vraiment pas.

Pardon? C'est quoi ces conneries? Tout l'état major est au courant de ce que tu as fait et à quel point tu as assuré nos arrières là-bas. Alors de quoi tu parles bon sang? Pas une seconde j'ai caché le déroulement de la mission! J'ai fait mon rapport dès qu'on est rentrés à la base, et je vous ai tous nommés pour avoir les décorations que vous méritez. En quoi je ramasse la gloire des autres hein? Tu m'expliques?

Il se rapproche, et je me prépare à riposter, avant qu'il finisse simplement par se planter face à moi et m'observer quelques secondes, du même regard étrange que j'ai vu que chez lui. Chez lui et chez personne d'autre. Avant de nouveaux hurlements. Et c'est seulement après cette nouvelle brassée d'insultes que je comprends enfin de quoi il parle, et tout s'éclaire comme par magie. Putain cet idiot pense que c'est à cause de moi qu'il s'est fait canarder. Je soupire, avant de le regarder froidement.

Déjà tu changes de ton. Je suis pas ton pote, mais ton sergent. De deux, mais jamais j'aurais pu te révéler à ces connards! Et pourquoi? Parce qu'il s'est passé quasiment dix minutes entre le moment où je t'ai remercié, et le moment où ce foutu camion est apparu! J'étais déjà dans la baraque abandonnée quand la vague suivante s'est pointée. Y'a aucun moyen pour qu'ils aient pu me voir te remercier merde! Suffisait qu'ils aient un type avec des jumelles dans le lot et c'était bon! Ou quelqu'un qui ait assez d'expérience pour trouver le meilleur emplacement pour un tireur! C'est clair Lev? Et c'était pas ta victime, c'était ta MISSION! Merde tu parles comme un foutu tueur en série. Alors maintenant tu vas BAISSER D'UN TON et arrêter la parano! Oui c'est moche ce qui t'es arrivé, mais t'es pas le seul à avoir été blessé. On est en guerre merde! Yuri a perdu une oreille et Piotr s'est fait transpercer la cuisse! Donc si j'entends encore une fois que tu veux me buter, je te colle chez le psy de la garnison, qui t'expliquera que je suis pas le mec à qui tu devais mettre un pruneau, et que pour lui tu t'en es bien tiré! C'est clair!

J'ai mon index pointé vers lui alors que je finis ma tirade et ma voix se radoucit.

Allez, retourne dans ta chambre Lev, tu vas mieux mais t'as quand même été blessé et t'as besoin de repos. D'ailleurs est-ce que t'aimerais que je te ramène quelque chose? Yuri m'a demandé des magazines de cul et Piotr voulait des mots croisés et des sudoku. Donc quand je reviendrai vous voir demain, je peux aussi prendre quelque chose pour toi. D'accord?


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Andréas
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Andréas
Mer 16 Mai - 19:22

Mercy
Je comprends et vois ce qu'elle lui trouve. Elle doit le voir comme beau, attirant et séduisant. Elle doit aimer ses lèvres, son regard et sa voix. Elle doit se dire qu'elle a de la chance de s'éveiller à ses côtés chaque jours que Dieu fait. Je suis sûr qu'elle caresse souvent sa joue en se disant qu'elle a pour mari un homme bon et vertueux, un saint qui pourtant lui offre tout les péchés de la chair… Un homme qui l'aime et un ange dont je m'apprête à briser les ailes. Mes yeux qui jusque-là se promenaient sur ses lèvres que je rêve d'arracher d'un coup de dent, remontent désormais jusqu'aux siens, me permettant de me perdre dans ses pupilles qui se veulent froides. Je serre les dents mais ne suis pas réellement impressionné par les mots qu'il a pour moi. Tout sonne comme les aboiements d'un chien que je n'aurais qu'à étrangler pour le faire taire. Je ne bronche pas quand il hurle et me contente de fantasmer sa mort à venir. Alors qu'il tente de faire preuve d'autorité, j'imagine le goût que peut avoir son sang, la couleur que sa peau prendrait et les bleus qui s'y formeraient. Il me menace, tente de me remettre à ma place, en vain. Il ne se rend pas compte que je ne le crains pas. Tout comme il ne sait pas l'importance que je porte à mes cibles. Il ne sait pas que tout devient personnel au moment-même où j'appuie sur la détente… Il est un sergent, il ne peut pas savoir ce que c'est d'être le soldat de la Mort elle-même… Lui est soumis aux lois humaines… Moi… Je fais ça par envie, par plaisir peut-être… Mais surtout par envie d'accomplir mon rôle de cavalier de l'Apocalypse. Comme si j'étais un enfant il me pointe de son index et ensuite se radoucit, prenant un air de père qui me fait grincer des dents.  Mes épaules se crispent à nouveau et pourtant c'est un rire qui m'échappe, dissonant au possible.

"Des magazines de cul et des jeux pour les vieux ? Tu sais, si t'as peur que j'ai pas assez d'imagination pour trouver de quoi me branler, je te rassure, il me suffit de voir passer une charmante infirmière et j'ai de quoi faire. Suffit qu'une entre pour me changer ma perfusion et je serais déjà dur."

Le rictus sur mes lèvres doit être dégueulasse mais je m'en fous, car contrairement à lui, je me sais aussi immonde que mon âme. Je sais que j'ai rien du bel homme qu'on désire mais tout de celui qu'on craint et qu'on trouve immonde. Je sais que je n'ai pas ce qu'il dégage et que je ne l'aurais jamais. Je me recule, peut-être d'un pas seulement, montrant les dents tandis que je reprends.

"Nous ne sommes ni des amis, ni des connaissances, ni même des proches. Tu étais peut-être mon sergent, mais depuis que j'ai la preuve de ton incompétence, j'estime ne plus te devoir le moindre respect. Tu m'as sauvé de la merde dans laquelle tu m'as fourré. C'est parce que tu as révélé ma position que j'ai faillis y passer. Et certes, les autres sont arrivés plus tard, tu devrais savoir que c'est la règle numéro un des mecs intelligents qui bossent avec des snipers : ne jamais dévoiler leurs positions, même quand on se pense en sécurité. T'aurais pu me remercier une fois à la base. Là t'aurais pu me mettre une tape sur l'épaule et me dire que c'était un beau tir… Mais non. Fallait que tu joues les héros pour le reste du bataillon… Tu cherchais à impressionner l'un d'entre eux ? L'infirmier, hein ? T'étais comme les autres à dire que t'avais envie de te le faire ?"


Je suis sûr qu'il est comme les autres, comme les sales désaxés qui s'imaginaient le prendre et le faire hurler de plaisir. J'suis sûr que le soir, dans son lit, il s'imaginait ce que ce serait de lui faire cambrer le dos et de lui casser les reins. Il devait se voir à planter ses dents dans sa nuque, à griffer ses hanches et à le faire saigner. Il devait imaginer des choses répugnantes et se toucher sous ses draps. Il doit être un homme aussi immonde que ça. Un ange qui devrait perdre son auréole. Mes doigts s'approchent de la perche à perfusions que je saisis tandis que dans mon regard apparaît cet éclat que j'ai alors que je m'apprête à tirer.

"Je ne veux rien de toi, Ivan. Rien. Ni de ta médaille à la con ou de ton faux paternalisme… Je veux retourner sur le terrain et juste faire ce que je sais faire de mieux : tuer. Je ne veux pas rester une seconde de plus dans ce trou. Je veux mon fusil de sniper et une mission… Je suis pas comme les autres, j'ai pas besoin d'être soigné et dorloté par des infirmières. Je ne suis ni brisé, ni malade. Je vais bien. Je n'ai besoin de l'aide de personne."

Quelque chose glisse le long de mon échine, comme le rappel de souvenirs et d'un discours que j'ai déjà tenu à d'autres. La réalité devient floue sous mes yeux et Ivan se pare d'un physique qui n'est plus le sien. Il devient un autre, un qui m'empêche de vivre, de me découvrir et d'être libre. Un qui me façonne de ses poings, qui grave dans mon dos son amour et sa rage. Il veut me priver de ce qui m'est vital… Il pense que je suis comme les autres. Vers lui je m'avance et une fois à portée, j'esquisse un geste ample pour tenter de le frapper au visage à l'aide la perche, bien décidé à le tuer en ce jour.©️ 2981 12289 0
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Andréas
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Andréas
Mer 16 Mai - 19:22
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Lev Baranov
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Lev & Ivan
Je sais pas ce qui le met dans cet état mais une chose est sûre, j'aime pas ça. Il a cette lueur dingue et de colère froide dans ses yeux de glace qui me mettent salement mal à l'aise. Jusqu'à présent j'étais toujours arrivé à le canaliser pendant les missions, lui collant juste l'étiquette de ''mec un peu bizarre'' mais là... là j'ai l'impression de découvrir un autre Lev, ou en tout cas le Lev qui avait l'air d'être caché sous un masque plus...politiquement correct. Plus humain même. C'est ce que je réalise alors que mes mots ont pas l'air de l'avoir calmé. J'ai essayé l'autorité, lui rappelant que je suis quand même son supérieur, et qu'il a pas à me parler comme à un chien, mais rien à faire. La manière douce? Pas mieux. Il est comme un taureau furieux que rien peut arrêter, ni calmer. Quoi que je puisse dire, peu importe la manière dont je l'aborde, il reste buté. Il est persuadé que je suis les dix plaies d'Egypte en un seul homme et ça a le don de m'énerver. Je sais reconnaître quand j'ai fait des conneries, mais là j'ai rien à me reprocher.

Je le pousse dans la chambre vide, histoire d'éviter une scène en public, et une fois dedans, porte fermée, je l'entends rire. Mais pas un rire drôle non...un rire qui sonne faux, comme des ongles sur un tableau noir ou une porte qui grince. Le genre de rire qui fait se hérisser les poils de la nuque. Je le contemple, étonné de le voir aussi calme tout d'un coup, se marrant alors que juste avant il menaçait de me tuer dans le couloir... Putain une vraie girouette, et je sais pas si c'est pour me rassurer, ce passage aussi rapide de l'un à l'autre. Avant d'avoir presque la nausée en entendant sa remarque sexiste sur les infirmières. Alors ouais, dans l'armée, les types sont plutôt des rustres, mais j'ai toujours interdit ce genre de réflexions. Ils ont tous des mères, des soeurs, des filles et des femmes, et ils aimeraient pas qu'un type parle sur elles de cette manière. Une des règles que j'ai imposées.

Lev, parle pas comme ça. Sois déjà content qu'elles se démènent pour s'occuper de toi sans que tu fasses ce genre de réflexions...

Et encore une fois, comme une girouette qui tourne quand il y a un coup de vent, il passe du sourire carnassier de prédateur, mélangé avec un côté malsain, à la colère. Sans que je dise quoi que ce soit il repart dans son délire parano et montre encore une fois les dents. Putain... mes poings se serrent alors qu'il recommence à m'attaquer, et m'insulter, me traitant d'incompétent, osant balancer que tout ce que je fais, c'est juste pour la gloire. Et, cerise sur le pudding, il va même jusqu'à insinuer que l'infirmier m'intéresse. Est-ce qu'il sait? Est-ce qu'il aurait deviné? Mais le pire dans tout ça c'est que le petit infirmier est pas du tout mon genre! Je fronce les sourcils, commençant à sentir ma colère qui bouillonne petit à petit dans mes veines en écoutant ce ramassis de conneries diverses et variées.

Encore une fois, j'étais même plus dans le même quartier que toi quand le camion est arrivé! C'est impossible qu'on ait pu me voir t'entends! Et c'était même pas prévu qu'il y ait ce foutu 2e camion! Pour moi la mission s'était finie avec le premier, et mes sources avaient même pas mentionné le deuxième convoi! Sors-toi ces conneries de ta tête maintenant!

Je me demande ce qui lui a fait penser ça. J'ai jamais eu un regard pour le nouveau, pas une attention déplacée, même pas un sourire plus appuyé pour lui que pour les autres. Au boulot, rien. Qui j'aime tringler la nuit, c'est dehors, c'est la nuit, c'est une fois que mon uniforme est au placard et que j'ai passé mon blouson en cuir. C'est dans des clubs privés où personne n'ira parler de qui il a croisé et qui il s'est tapé. Les gars de mon régiment, ce sont des soldats. Des soldats qui sont des hommes, mais pas des mecs. Y'en a aucun que j'ai vu différemment d'un simple collègue, et un peu d'un ami. Jamais. Alors d'où est-ce qu'il sort ça? Je vois sa main sur sa perfusion et je l'observe, sans même y faire attention, mais comme un prédateur attiré par le mouvement, et qui prévoit l'attaque.

Eh bien tant mieux si tu veux te barrer d'ici! Dès que t'auras l'aval des médecins et des psys tu retourneras sur le terrain et cette balle sera de l'histoire ancienne. Mais dans tous les cas m'insulter et me traiter de tous les noms va pas aider à ce que tu sortes plus vite, loin de là. Donc tu te laisses soigner, t'arrêtes de faire des putain de scandales et de foutre la trouille à ces pauvres infirmières et ça sera tout! Tu seras dehors en un rien de temps et tu repartiras. Si bosser avec moi est si terrible, j'appuierai ton changement de régiment, et tu seras plus obligé de me supporter, mais en attendant, fais profil bas putain! Tu bosses avec des médecins de l'armée! Des types qui peuvent te péter tous les os. Ils voient comment tu te comportes ici, et si tu fais trop le con, tu seras saqué. C'est ça que tu veux?

Je soupire, et au moment où je commence à me tourner pour sortir d'ici, et le laisser seul, je vois son mouvement du coin de l'oeil. J'ai juste le temps de lui faire face et de choper la perfusion à deux mains, avant de le repousser en lui collant un coup de pied dans le plexus. Il recule de quelques pas, chancelant, alors que je lui retourne une droite.

Putain mais t'es vraiment con Baranov? Tu m'expliques ce que t'essaies de faire ça? Tu cherches quoi? Non mais t'es malade mon pauvre garçon!


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Andréas
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Andréas
Mer 16 Mai - 19:23

Mercy
Je vois déjà cet instant merveilleux arriver. Celui où la perche va le percuter et ruiner son beau visage. Ce moment de grâce où je vais sentir ses os se fêler et sa peau se couvrir de bleus et de sang. Alors que je sens mes propres points sauter, incapables de supporter l'effort que je produis, je ne pense qu'au bruit que l'impact produira et à ce que je pourrais lui faire tandis qu'il sera vulnérable et à mes pieds. Un début de cri m'échappe, plus comme une réponse à la douleur qu'une réelle envie d'exprimer la rage qui m'habite en cet instant. J'ignore la douleur, le pansement qui se teinte de sang et l'adrénaline qui file dans mes veines, ne pensant qu'à simplement faire ravaler ses mots à cet homme qui pense avoir la moindre autorité sur moi. Le grand Ivan, qui devait penser qu'il me tenait au bout d'une laisse et qu'il pouvait m'ordonner n'importe quoi, lui qui pensait avoir mon respect… Lui qui n'a jamais dû comprendre que je ne tuais pas parce qu'il me l'ordonnait mais simplement parce que j'en avais envie et qui devait penser que j'acceptais d'être sous ses ordres par envie de servir mon pays plutôt que par pur plaisir malsain. Heureusement, tout prend fin aujourd'hui. Il va me suffit d'un coup et je me débarrasserais de lui. Un coup et je serais libre de tuer à nouveau. Libre de redevenir cet enfant de la Faucheuse. Le temps semble suspendre son envol et si je pense être capable de l'atteindre, voilà qu'il vient me donner tort, saisissant à deux mains mon arme de fortune, me stoppant ainsi dans mon élan. Presque sonné par ses réflexes, je viens croiser son regard, les crocs en avant tandis qu'il me fait taire d'un puissant coup de pied au plexus qui m'arrache un autre cri. De deux pas en arrière je chancèle, tentant de reprendre mon souffle tandis qu'autour de moi, tout se fait chaos et taches noires sur ma pupille. Respirer me semble être compliqué et l'épaule de nouveau en sang, ma mortalité se rappelle à moi. Je suis fais de chair et de sang, et même si chaque jours que Dieu fait je tente de me convaincre du contraire, il me faut admettre en cet instant que j'ai mes faiblesses… Et que celle qui me fait subir le crochet du droit qu'il m'assène n'est autre que cette blessure, cette plaie laissée par cette balle que je n'aurais jamais dû prendre. Un grognement sourd m'échappe et ma tête bascule violemment sous l'impact, tandis que les lèvres entrouvertes, je crache un peu de salive. Lentement je relève la tête, étrangement excité par sa rage. Enfin… Enfin tu montres que t'as des couilles et que t'es capable de te salir les mains. Je passe ma langue sur mes lèvres et croise à nouveau son regard, le souffle court.

"Non, bien au contraire, je suis parfaitement lucide… C'est toi qui est parfaitement con à t'entêter et à ne pas vouloir comprendre."


Je m'apprête à faire un pas vers lui, bien décidé à lui rendre sa droite, quand la porte derrière-lui s'ouvre à la volée, dévoilant deux armoires à glace en blouse que je comprends rapidement être les infirmiers qui s'occupent des patients violents. C'est désormais un pas en arrière que je fais, secouant légèrement la tête quand les deux hommes dépassent Ivan. Je montre les dents et tente de me mettre en position pour attaquer, n'étant gêné que par cette blessure qui me fait souffrir le martyr. Je tente de bouger mon épaule gauche mais c'est tout mon bras qui semble inutilisable. Un espèce de son plaintif m'échappe et c'est quand ils me saisissent un peu brusquement que je commence à me débattre, arquant le dos et griffant tout ce qui passe à ma portée. J'enfonce mes ongles dans la chair de leurs bras, je claque des dents pour tenter d'être menaçant mais je suis au mieux calmé d'un puissant revers dans le nez qui a le mérite d'avoir les mêmes effets que le plus puissant des tranquillisants. Abruti par la douleur, je peine à garder les ouverts alors que coule sur mon visage un long filet de sang. Des mots sont échangés et tandis que je perds lentement conscience, je sens qu'on me traîne hors de la chambre, me ramenant sûrement dans celle que je n'aurais jamais dû quitter. Ma tête se fait lourde et bientôt, je ne deviens qu'un paquet qu'on transporte. Mes yeux se ferment et ne se rouvrent que ce qui me semble être des années plus tard. Ma bouche est pâteuse et je me sens particulièrement sale. Je pue. Mes cheveux me collent à la peau et sous l'odeur du désinfectant, j'ai l'impression de sentir ma propre transpiration. Je passe ma langue sur mes dents et je m'étonne à les trouver propre. Ça doit être la morphine alors qui me file cette impression de sortir d'une mauvaise cuite. Un soupir glisse d'entre mes lèvres entrouvertes et enfin je tente de bouger, comprenant alors que je suis entravé à ce lit que je ne dois plus quitter. Agacé, je commence à me débattre, tirant les liens qui entravent mes poignets. J'arque le dos, commente à jurer à voix haute, tirant à nouveau sur les points et sur la perfusion, me foutant de savoir si je vais encore abîmer ma chair ou mes veines. Tout ce qui compte, c'est de me libérer et de quitter cet état de vulnérabilité. Le bruit que je provoque finit par attirer une infirmière et quand celle-ci passe la porte de ma chambre, je m'autorise le droit de l'insulter, ce qui lui arrache un vague sourire.

"C'est ça. Continue de me dire que je suis une salope."


Je serre les dents alors qu'elle s'approche, restant méfiant quand à ses intentions. Pendant quelques secondes, rien n'est dit et si j'ai dans l'envie de lui demander de me détacher, juste pour avoir par la suite le plaisir de lui déboîter la mâchoire puis les reins, voilà qu'elle me surprend d'un crachat qui termine sur ma joue. "C'est pour ma collègue gros taré de merde." Sa salive s'accroche à ma barbe naissante et malgré le regard que je lui jette, elle poursuit, posant ses doigts sur ma perfusion qu'elle retire. "Tu vas avoir le forfait complet pour les détraqués : l'évaluation psychologique, le traitement lourd, les interrogatoires de tes supérieurs… Ils vont se faire un plaisir de disséquer ton petit cerveau de merde pour ensuite te foutre dans une prison pour les tarés. Tu sais, ceux qui en sont revenus au stade de bouffer de la compote et de se mettre des crayons dans le nez." Elle change mon dosage et replace l'aiguille dans mon bras, faisant exprès de me massacrer une veine ou deux avant de correctement la mettre. "Pardon…" qu'elle me dit avec sourire avant de me laisser ainsi, m'annonçant simplement que les médecins passeront dans quelques heures. Furieux je l'observe s'éloigner et je ne desserrer les lèvres pour la menacer à mon tour que lorsque qu'elle s'apprête à quitter ma chambre.

"J'espère pour toi qu'ils vont me foutre dans un trou et m'y laisser crever… Parce que si c'est pas le cas, tu seras la première à qui je viendrais rappeler qu'il ne faut pas se mettre à dos un sniper.
- Ce que t'es mignon… On est formés pour gérer les gars dans ton genre. T'es pas le premier et tu serais sûrement pas le dernier."

Et sans un mot de plus elle quitte la chambre, me laissant seul pour les prochaines heures à venir. Je ne sais pas vraiment combien de temps passe. Le jour semble à peine décliner et vers ce que je pense être la fin d'après-mid que les médecins passent. On me pose un tas de questions auxquelles je ne réponds pas, me contentant de fixer droit dans les yeux ceux qui pensent avoir le droit de comprendre ce qui peut se passer dans ma tête. Jamais je ne desserre les lèvres et me contente de poser sur eux un regard froid et dénué de la moindre envie de coopérer. Ils insistent et finissent par abandonner, me disant qu'ils reviendront demain et que je devrais bien dire quelque chose. Pour le reste de la journée et la nuit incluse, je suis seul dans ma chambre, attaché à mon lit comme une bête le serait dans un cage, à fixer la porte, faisant mentalement une liste de tout ceux qui perdront la vie le jour où je quitterais cette chambre. Les heures passent et je fantasme sur toutes ses vies que je vais prendre. J'imagine tout ce que je pourrais faire et dont je ne me priverais pas. La mort viendra pour eux et moi avec. Je serais son émissaire et tous tomberont. La porte finit par s'entrouvrir et voilà que se présente à moi le bel Ivan, l'archange de la Mère Patrie. Le grand tueur de dragon et porteur de lumière. Je serre les dents et relève le menton, parfaitement conscient que je dois avoir une sale gueule. Je serre les poings et le laisse entrer sans rien dire, penchant simplement la tête sur le côté avant d'user de ma voix rendue rauque.

"C'est eux qui t'envoient ? Tu viens me dire qu'ils t'ont demandés de faire un rapport sur moi ?"

Je passe rapidement ma langue sur mes lèvres, détournant le regard.

"T'as sûrement dû leur dire que je suis dérangé… Vu ce qui s'est passé hier…"

J'ai un sourire amer.

"Vous comprenez pas… Ni toi, ni eux… Personne. Je dois être sur le terrain… Je dois avoir une arme entre les mains… Je dois être son cavalier l'apocalypse… Celui qui apporte la mort."

C'est ma raison de vivre. La seule. D'être le soldat de la Faucheuse.

"Tu ne comprends pas."

Je recommence à tirer sur mes liens, retroussant les lèvres pour dévoiler mes crocs, pas si à l'aise que ça d'être ainsi, en sa compagnie.©️ 2981 12289 0
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Andréas
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Andréas
Mer 16 Mai - 19:23
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Lev Baranov
« Mercy »
Lev & Ivan
C'est vraiment bizarre. Lev est dans mon régiment depuis au moins deux ans, et putain, on en a partagé des missions, parfois carrément sales. Des zones à délivrer, des rebelles à saquer, des villes à sécuriser quand on craignant des attaques ou des attentats, ce genre de choses. Des semaines, des mois en mission, à être parfois coincés dans des planques, dans des campements perdus, à tuer le temps ou à guetter, seuls tous les deux, ou avec les autres. Et après tous ces moments, toutes ces heures, toutes ces bornes que j'ai faites avec lui, à ses côtés, j'ai l'impression de le découvrir aujourd'hui. Je me rappelle que je planquais toujours une bouteille de whisky dans mon paquetage pour mes hommes, en cas de coup dur, et que parfois, quand on était de tour de garde tous les deux, je nous en servais un verre, et on fumait en jouant aux cartes ou en parlant de tout et de rien, et il faisait parfois tellement froid qu'on gardait nos mitaines pour jouer, et que de la buée voletait devant nos lèvres, installés près du feu de camp d'un chauffage d'appoint. Bien sûr que je savais qu'il aimait tuer, et pas dans le sens d'un héros qui a l'impression de rendre la justice, non. Il s'en fichait de qui il tuait, et pourquoi, ce qu'il aimait, était tout simplement d'être celui qui était installé derrière le viseur et qui contrôlait le point rouge mais je m'en fichais. Je m'en fichais parce que je croyais que c'était ce qui le rendait bon, foutrement bon à ce qu'il faisait, le fait qu'il soit détaché de tout et s'implique pas. Seulement...je pensais pas qu'il cachait ça, en lui. Cette rage et cette colère, alors que jusqu'à présent j'étais celui avec qui il s'entendait le mieux dans le régiment. Les autres, il leur adressait à peine la parole. Nous...on discutait.

Et là... une partie de moi a du mal à se dire que c'est lui, le Lev qui m'a suivi aux quatre coins de la Russie et de l'Ukraine, nous trainant jusqu'en Sibérie ou aux frontières avec la Chine. Sûrement les médocs. Sans doute les médocs. Ca doit être ça. Ca peut être que ça. J'aurais pas pu me planter autant sur un de mes hommes, c'est pas possible. Je...j'essaie de faire attention, de veiller sur eux, sans être leur père mais au moins... quelqu'un. C'est mon rôle de faire ça, et me dire que depuis des années j'ai fait fausse route, j'aurais pu le voir totalement autrement qu'il n'est...ça me fait flipper quand même un peu. D'avoir été un mauvais commandant, pour eux. D'avoir pas su remarquer qu'il allait pas bien... Mais non...C'est le choc, les médocs, l'opération...tout ça. C'est ce que je me dis et que je me répète quand mon pied le fait reculer alors qu'il allait me frapper, et que mon poing fermé lui retourne une droite qui aurait pu coller à terre un ours. Je recule ensuite, les poings levés, me préparant à une riposte qui va arriver, je le lis dans ses yeux. Il est déchaîné, complètement pris dans sa rage, et rien n'arrivera à le calmer pour l'instant. Enfin...rien à part le troupeau d'infirmiers qui arrive d'un coup, me faisant sursauter. Des blouses blanches partout, tout autour de moi, et je recule pour les laisser faire, alors que Lev commence à se barre et à ruer comme un cheval devenu dingue.

En quelques secondes, la pièce se remplit de cris et de hurlements. Lev se débat comme un dingue, et je l'entends gronder, voire grogner contre l'armée de soigneurs qui s'approche de lui et qui tente de le maîtriser. Des poings, des pieds, des cheveux et des blouses blanches, c'est tout ce que je vois, et bientôt un des gorilles me demande gentiment de sortir pour les laisser faire leur boulot. J'obéis sagement, après un dernier regard attristé à Lev. C'est quand même moche d'en être arrivé là... J'essaierai de le revoir demain, ou dans les prochains jours, quand je repasserai voir les autres. Je retrouve facilement la sortie et rentre chez moi. Vali n'est pas encore là et je salue Lyuba, notre employée, avant de me mettre à genoux pour accueillir ma petite tornade blonde qui court vers moi avec un grand sourire. Pendant quelques minutes je me roule par terre avec lui, le chatouillant et m'éclatant à faire se promener ma barbe dans son cou pour le faire se tortiller. Son rire, son odeur de bébé... tout ça a le don de faire s'envoler ce qui me préoccupe, et brutalement, plus rien n'a d'importance à part son circuit de voitures et son jeu de construction. Après quelques mots avec Lubi qui me raconte ce qu'elle a fait et la journée de Sasha, elle rentre chez elle et on reste entre hommes. Ce soir Vali rentre et en attendant qu'elle arrive on met la table et on surveille le repas que Lubi a fait en jouant à Batman.

Quand Vali rentre, on dîne tous les trois, on parle de choses et d'autres, et je file mettre Sasha au lit pendant qu'elle débarrasse. Après son histoire préférée, l'oiseau de feu, je l'embrasse sur le front et éteins sa lumière, le laissant avec sa petite veilleuse. Je retrouve ma femme, et je m'allume une clope avant de me servir un verre. Installés tous les deux dans notre canapé, mon bras autour de ses épaules, je lui raconte ce qui s'est passé, Lev, les coups, ce qu'il m'a dit, et ce que j'en pense.

Ivan... je sais que tu l'aimes bien et que tu t'inquiètes, mais ce que tu me dis me fout la trouille. Il a pas l'air bien dans sa tête...pas bien du tout... fais attention à toi d'accord?
Promis ma belle...
Bien. Et si on continuait notre série?
A vos ordres sergent!


Je souris et attrape la télécommande.

Le lendemain ma journée se passe bien au bureau, entre réunions et dossiers à traiter. Je pars un peu avant l'heure pour retourner à l'hôpital militaire et joue les père Noël avec les garçons, rapportant magazines et clopes à ceux qui m'en ont demandé. Puis vient Lev... les infirmières me disent qu'elles ont dû le sédater et l'attacher pour qu'il arrête ses conneries, et quand je pousse la porte, j'avoue que ça me fout mal de le voir comme ça, sanglé à son lit d'hôpital. Je m'approche lentement et essaie de sourire. Sauf que ses premiers mots m'inquiètent déjà.

Qui eux? Non Lev... je suis là parce que j'en ai envie... je m'inquiète pour toi et c'est pour ça que je suis là. Je voulais voir si ça allait mieux qu'hier...rien de plus.

Je m'approche de lui et m'assieds sur le fauteuil près du lit.

Je n'ai rien dit à personne. T'étais blessé et en colère, les médocs parlaient à ta place. Quand tu iras mieux, que ta blessure sera cicatrisée, tu vas oublier toutes ces conneries. Ca va passer.

Non je comprends pas, mais je sais que tu es un très bon sniper. Le meilleur que je connaisse. Par contre faut que t'arrêtes de dire des conneries pareilles si tu veux pouvoir revenir sur le terrain. T'es un sniper, un militaire, et c'est tout... vire ces conneries de la Bible, ils aiment pas ça...

Je pose ma main sur son genou et lui souris.

Tu verras, d'ici peu tu sortiras d'ici et peut-être qu'on retournera sur le terrain ensemble, à boire du whisky pour tromper l'ennui quand les planques sont trop longues et que les heures ne passent pas...d'accord?

Sauf qu'il essaie de se redresser, et le lit grince sous son poids alors qu'il montre les dents. Je sursaute, ôtant ma main. Putain mais qu'est ce qui lui arrive...

Lev, calme toi. J'aime pas te voir dans cet état-là. Et si tu continues, c'est pas juste de plus tirer dont faudra que tu t'inquiètes... mais de pas finir à l'asile...


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Andréas
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Andréas
Mer 16 Mai - 19:23

Mercy
L'ange ne comprend pas. Une main posée sur mon genou, à tenter de me prêcher la bonne parole qui devrait nettoyer mon âme, il refuse d'entendre ce que je lui dis, pensant surement que ce ne sont que les drogues qui courent dans mes veines qui me font avoir de telles paroles. À la manière d'un enfant, il ferme les yeux face aux sujets importants, préférant sûrement se bercer de l'illusion d'une certaine image d'un Lev qu'il pense avoir appris à connaître. Ce contact me fait frémir et montrer les dents, alors que je commence à me débattre, cherchant à briser les liens qui m'entravent. Mon souffle déjà se fait plus court tandis qu'autour de nous, les machines s'affolent au rythme des battements de mon coeur. Sa main se retire et un semblant de rire m'échappe quand il ose me dire qu'il n'aime pas me voir dans cet état-là. Non, tu ne dois pas aimer… Les anges n'aiment pas devoir faire face à ce qu'ils ne peuvent comprendre ou maîtriser. Tu ne dois pas savoir quoi faire et pire, tu dois avoir peur… Peur de ce que je pourrais te faire, peur de ce qui aurait pu t'arriver et de ce qui va se passer. Tu me crains désormais, car dans mon regard, tu contemples ta propre mortalité. Tu trembles parce que comme les autres, Ivan, tu sais qu'à tout moment je pourrais avoir envie de faire de toi le prochain oiseau à qui je briserais les ailes. Les lèvres entrouvertes, le coeur au bord de celles-ci, je recommence à murmurer, les babines retroussées en un rictus aussi mauvais que l'enfer peut l'être.

"Je suis calme… C'est ce que tu ne comprends pas… Je le suis."

Les poings serrés, je continue d'abîmer contre mes attaches la peau de mes poignets, qui déjà s'irrite et se blesse. Du lit, je tente de m'extraire, reprenant d'un ton presque fiévreux.

"Ils ne pourront m'enfermer, je suis lucide, je sais ce que je dis et je sais ce que je suis, Ivan."

Vers lui je lève les yeux, exhibant toujours ma dentition alors que je reprends.

"Je ne peux pas être contenu entre quatre murs… Je suis son émissaire, tu comprends ? L'amant à qui elle vient murmurer de douces paroles, celui qui porte sa faux et exécute sa volonté. C'est pour ça que je dois être sur le terrain, mes mains ne connaissent que la mort et la violence. J'ai été conçu, crée et formaté pour tuer. C'est ce que je suis."


Je claque presque des dents avant de me laisser retomber sur le lit, poussant un long soupir en comprenant que je ne pourrais pas briser mes liens… Si je veux sortir, il va falloir que je joue le jeu, ou que je trouve un moyen de trancher mes attaches. Je semble me calmer, accepter qu'il va me falloir du temps pour sortir d'ici. Je prends une grande inspiration et desserre les poings.

"Je dois retourner sur le terrain Ivan. Ils veulent m'enfermer… Ils pensent que je suis fou, mais toi… Tu as compris ce que je suis… Tu sais que je suis le meilleur et que l'armée a besoin de moi. Tu dois leur dire Ivan… Moi ils ne m'écoutent pas."

Ivan est peut-être mon seul espoir. Celui qui peut peut-être me sauver de tout ça. Après tout, il me doit bien ça. C'est à cause de lui que j'ai été blessé… C'est lui qui m'a fait atterrir dans ce mouroir, alors c'est à lui de m'y tirer. Les anges sont censés tendre la main même aux pécheurs non ? Mon souffle redevient régulier, au même titre que les battements de mon coeur. Les machines se taisent et bientôt, tout ne se résume qu'à nous. À la façon dont mes prunelles accrochent les siennes, à mes mèches de cheveux qui collent à ma peau, à la façon dont mes lèvres sont entrouvertes. Je deviens conscient de tout ce qui m'entoure, et comme si je m'apprêtais à tirer, je compte les battements de mon coeur, cherchant entre deux pulsations de celui-ci mes mots.

"Je sais ce que j'ai fais et dis hier. Je sais ce que tu peux penser de moi… Mais tu me connais, tu sais celui que je suis sur le terrain. Tu  connais ma valeur… Tu as vu les ailes dans mon ombre et sa silhouette à mes côtés. Tu sais que je suis son messager… Au fond de toi, tu sais que je suis son cavalier de l'Apocalypse, et c'est pour ça que tu as peur de moi mais que tu es là."

Je ne saurais expliquer ce qui brille dans mes yeux en cet instant. Les mots glissent d'entre mes lèvres sans que je ne puisse les contrôler, les paroles n'ont pas vraiment de sens, je m'en rends compte. Tout est cryptique, à la limite du fanatique. Ivan ne va rien comprendre. Il va me penser fou. Mais tant pis. Il est peut-être le seul qui puisse me faire gagner un peu de temps. Oh, je ne dis pas que je me jetterai dans ses bras, mais disons que sa mort et celle des autres arriveront plus vite, au même titre que ma liberté. Je ne peux rester ici. Blessé ou pas, j'ai une mission à accomplir, une vengeance à mettre en place et des pulsions à calmer. Ivan sera mon Icare et je serais son soleil. Celui qui brûlera ses ailes et qui le noiera. Mais pour ça… Il doit me tendre la main, afin que je sois capable de lui arracher la gorge.

"Tu me dois ça… Après cette balle… Tu me dois ça. Tu dois les convaincre que je suis essentiel. Que je dois tuer pour ne pas sombrer… Tout est de ta faute… Et si tu veux sauver ta peau… Il est dans ton intérêt de me faire sortir."

La sentence tombe. Un sourire se glisse sur mes lèvres et je ris, faisant claquer mes dents, mimant cette envie que j'ai de planter mes crocs dans sa chair. Tu seras mien Ivan. Tu seras ma proie. Ma plus belle offrande à la Faucheuse.©️ 2981 12289 0
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Andréas
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Lev Baranov
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Lev & Ivan
Je reste sur mes gardes alors que je m'installe près de lui et que je lui parle. J'ai du mal à me dire que le Lev que j'ai tiré de ce grenier, blessé et en train de se vider de son sang est le même type qui est là, sanglé à son lit comme un taré dans un asile. Lev... on dirait que d'un coup on a appuyé sur un interrupteur, qu'il y avait le Lev d'avant, et que d'un coup, c'est presque quelqu'un d'autre qui a pris sa place, dans le même corps. Je ne lis plus tout à fait les mêmes choses dans ses yeux, et dans un sens, ça m'effraie autant que ça m'inquiète. Je repense aux paroles de Vali, à ses mises en garde, et je me dis qu'elle a raison, en partie. Oui, pour la première fois, il m'a paru dangereux. Enfin, depuis qu'on bosse ensemble, il était dangereux, mais pour les autres. Il était la Faucheuse, comme il aimait bien s'appeler, il était un sniper d'exception, d'une précision et d'une efficacité comme j'en avais encore jamais vu. Jusqu'à présent, je me sentais rassuré de l'avoir à mes côtés, protégé de savoir qu'il était l'oeil de faucon qui voyait tout, et qui éliminait la menace de loin, d'un coup sec, sans bruit. Il était celui qui transformait les ennemis en marionnettes dont on coupait brusquement les fils, et qui s'effondraient mollement sur le sol dans un feu d'artifice rouge et brûlant. Il était celui à qui je remettais ma vie à chaque fois que je parfais en mission et que j'allais sur le terrain. Il était notre gardien à tous, notre protecteur dans le ciel, et là...là j'ai une étrange sensation en le voyant...se retourner contre moi, comme un chien qui mord la main de son maître. D'imaginer que maintenant, il est un risque pour moi, alors que jusqu'à présent, il était une protection.

En le regardant, je me dis que c'est dingue, à quel point les choses peuvent changer en une seconde. Il aura suffi d'un battement de cils, un battement de coeur, pour que notre ange gardien devienne un ange de l'Apocalypse. Pour entrevoir la possibilité qu'il puisse nous faire du mal. Et là...là il est comme un chien enragé qui ne pense plus correctement, ni clairement. Il montre les dents, lutte contre ses liens mais sa voix est tellement calme que ça me file des frissons dans le dos. Et je hausse un sourcil en l'écoutant. Putain...il part loin, tellement loin... on aurait dit le pope de mon village, qui nous faisait de grands serments sur les châtiments de Dieu, la colère des Anges et tout le bataclan. Je laisse passer quelques secondes, pour trouver quoi lui répondre, parce qu'il me prend par surprise. Je ne l'imaginais pas comme ça. Je ne pensais pas qu'il avait ce genre d'idées en tête. Il disait qu'il aimait tuer, et qu'il aimait être de loin, celui qui décidait qui allait vivre ou mourir, mais jamais ses lèvres n'ont laissé échapper de tels trucs. Ce n'est pas le Lev que j'ai connu. Mais est-ce que je l'ai vraiment connu, justement? Grande question et pour l'instant je n'ai pas la réponse. Pas du tout. Je soupire avant d'ouvrir enfin la bouche, mes mains sagement sur mes genoux, jouant nerveusement avec le sac en papier qui continent un livre et quelques magazines et trucs de jeux.

Lev... Je vais pas te mentir, tu es le meilleur sniper que je connaisse, et plus d'une fois tu nous as sauvés, les garçons et moi. Pour ça je te serai toujours reconnaissant et je n'hésiterai pas à le leur dire, parce que c'est la vérité. Par contre, depuis que je t'ai sauvé, et que tu es ici, je te reconnais plus. Tu dis des choses qui m'effrayent et qui n'ont aucun sens. Je ne mentirai pas sur toi et sur les fois où tu nous as sauvés, mais je pense aussi que tu as besoin d'aide. Peut-être juste pour quelques semaines, mais tu aurais besoin d'aide... quelqu'un qui te ferait voir les choses plus clairement...

Il se calme, et l'espace d'une seconde je retrouve le Lev que j'ai toujours connu, calme et pas très bavard. C'est fascinant autant que flippant, le fait qu'il passe d'un état à l'autre aussi facilement, aussi rapidement.

Je sais ce que tu veux, mais je n'ai pas peur de toi. Enfin...j'ai peur de ce que tu dis, de toutes ces phrases qui n'ont pas de sens. Je sais que tu aimes la guerre, et que tu aimes tuer. Je sais que tu t'en fiches de qui tu tues, du moment que tu peux presser sur la détente et voir un corps retomber sur le sol. Ce qui me fait peur, c'est le délire dans lequel t'as l'air de t'être englué. T'es un sniper mais t'es pas Dieu ni un Ange bordel! T'es juste un type normal doué avec un flingue! Alors faut que tu t'ôtes toutes ces conneries de la tête sinon tu vas commencer à sonner comme Raspoutine! Et tu sais comme moi comment il a fini!

Quelque chose d'autre s'est ajouté à son regard mais je ne sais pas quoi. C'est peut-être ça le plus inquiétant, c'est que je sais pas ce que j'y lis. Ses yeux brillent mais à cause de quoi? La fièvre? Les médocs? Son délire? Tant que j'aurais pas la réponse, je resterai sur mes gardes. Là je m'aventure dans l'inconnu et ça me rassure pas. Pas du tout même. Je repose mes cadeaux sur la table près de lui et le regarde longuement, finissant par hocher la tête.

Je vais t'aider, même si encore une fois, c'est pas de ma faute si cette balle t'a atteint. Je vais t'aider parce que je suis ton supérieur, qui doit protéger ses hommes, et que tu as toujours fait un super boulot pour nous. Ca je te le dois, et je vais leur dire la vérité. Mais mon avis est pas le seul à compter. Mon témoignage comptera, mais les médecins vont aussi t'évaluer...

Je soupire, passant les mains sur mon visage avant de me forcer à sourire, et j'attrape le livre policier glissé dans le sac en papier.

Et si je te faisais un peu de lecture? J'ai trouvé ça au kiosque et l'histoire avait l'air pas mal. Alors, tu veux essayer?



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Andréas
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Andréas
Mer 16 Mai - 19:24

Mercy
Il est désespérant à ne pas entendre et comprendre. Il est même chiant à me faire ses petits discours à la con qui ne touchent personne à part peut-être les connards en son genre qui se pensent supérieurs au reste du monde parce qu'ils ont les grades qui vont avec. Alors certes, Ivan est pas le pire des gradés mais il reste un archange, un élu d'un Dieu tout-puissant au nom du quel il répand sa parole et sa lumière pour le soit-disant bien des autres. Il est un messager lui aussi, le porteur d'autres idéaux, comme l'espoir ou l'envie de combattre. Ivan est ce que je suis censé détruire au nom de la Faucheuse. Il est la lumière, la vie, le soleil et la chaleur humaine. Il est de ceux qui inspirent et qui construisent tandis que je suis celui qui tue et réduits en poussière d'une balle une existence toute entière. Je suis celui qu'on craint dans l'ombre et qu'on essaye de repousser par des prières. Je suis la Faucheuse. Celui qu'on préférais oublier et garder le plus loin possible. Et lui ? Lui est comme mon némésis, il est celui qui peut m'arrêter et me stopper mon hécatombe. Il est tout ce que je hais et qui étrangement, d'une certaine façon, me fascine. Son discours ne me touche pas, et après un léger sourire pour lui, je détourne le regard, préférant me perdre dans la contemplation d'un mur que de ses prunelles. J'entrouvre peut-être les lèvres dans l'espoir de lui répondre mais me retiens de justesse, préférant lui offrir un long silence jusqu'à ce qu'il comprenne que nous n'avons rien de plus à nous dire. J'entends le bruit d'un sac en papier que l'on froisse puis sa proposition. Au début, je suis bien tenté de laisser les machines répondre à ma place et lui faire comprendre par mon silence que je m'en fous, parce que je suis déjà occupé à planifier quelque chose de plus grand mais bien malgré moi, je me retrouve à lui murmurer du bout des lèvres.

"Oui… Essayons."

Sois donc le bruit de fond dont j'ai besoin, sois mon excuse et la visite qui me rendra humain. Un léger soupir glisse d'entre mes lèvres et sagement, je lui accorde le droit de rester, le laissant me lire un chapitre là où je planifie en silence ma vengeance et ma fuite. Je ne peux rester ici, car si ils soigneront mon corps, je sais qu'ils vont vouloir faire de même de mon esprit, et tant que j'aurais l'air malade à leurs yeux… Je ne pourrais pas quitter cette maudite chambre. Je n'ai pas tant d'options. Soit je dis ce qu'ils veulent entendre, et même là je ne suis pas sûr qu'ils me croient. Soit je continue de résister et espère qu'Ivan et le reste de mes supérieurs fassent pression pour me renvoyer sur le terrain… Et là encore une fois, ce n'est pas sûr qu'on me tende la main pour me sortir de cet enfer fait de médicaments, de blouses blanches et d'anesthésiants. Les secondes s'égrènent et les lèvres pincées, je me retrouve à devoir admettre l'amer vérité. Si ils ne me laissent pas partir… Je vais devoir fuir. Je vais devoir déserter et quitter l'armée. Cette simple idée fait glisser un long frissons le long de mon échine avant d'affoler autant mon coeur que les machines auxquelles je suis branché. Je devrais trouver un autre moyen de tuer et d'accomplir sa volonté. Je devrais déambuler dans les rues de Moscou et trouver au milieu des passants et de la neige souillée mes cibles. Je vais devoir évoluer, changer et me fondre dans la masse pour survivre. Car rester ici sonnerait la fin. Dans le plus grand des calmes, je l'écoute et quand il referme le livre, je frémis à peine, hochant simplement de la tête quand il me dit qu'il doit y aller mais qu'il repassera sûrement demain ou après-demain, histoire de voir si je vais mieux. Je ne réagis pas à ses mots et le laisse se lever, attendant qu'il soit sur le pas de la porte pour le retenir d'une parole.

"Ézéchiel 25, verset 17." Je me tourne vers lui, et pose mon regard de glace dans le sien. "Te voilà prévenu, Ivan."

Je me détourne à nouveau de lui, et je ferme les yeux, ne vérifiant pas tant dans quel état il quitte ma chambre. Tout ça n'a plus d'importance. Aucune même. Tout ce qui l'est, c'est d'apprendre les changements de gardes, le nombre d'infirmières différentes qui s'occupent de moi et surtout d'apprendre laquelle est la plus susceptible de faire une gaffe. Ce qui compte, c'est aussi de dire aux médecins ce qu'ils veulent entendre, même si ils sont les premiers à me dire que je mens et que ce n'est pas dans mon intérêt. Ce qui compte aussi, ce sont les visites d'Ivan et les longs moments où il me fait la lecture. Ce sont les instants où je peux me relâcher un peu, et faire le point sur ma situation. Trois jours plus tard, j'ai déjà l'idée du jour et de l'heure à laquelle il faut que j'entame mon évasion. Le lendemain, j'ai déjà une bonne idée de comment me débarrasser des liens, ayant réussis à voler une lame de rasoir à la femme qui vient me raser soit-disant pour mon confort. Et à la fin de la semaine, je suis prêt. J'ai passé la journée à me préparer, à répéter mon plan et alors que l'infirmière me laisse pour la nuit, je me mets au boulot. Je m'occupe de libérer mon poignet gauche, et à partir de là… Tout est trop simple. Je quitte le lit en moins de deux, j'arrache les perfusions et je deviens une ombre qui glisse. J'ai exactement deux minutes pour rejoindre le vestiaires des infirmiers, piquer une tenue et me barrer. Je fais ralentir les battements de mon coeur, et me glisse dans les couloirs, entendant les infirmières bouger, se demandant ce qui peut bien se passer dans ma chambre. J'entends les pas se rapprocher, libérant de ce fait dans mes veines une bouffée d'adrénaline. Je presse le pas. La porte est pas loin, et elles non plus. Elles vont pas tarder à comprendre. Elles vont se douter que je me tire mais elles vont me penser con. Elles vont se dire que je cours pour la sortie alors que moi… Je vise le services des urgences. Je pousse la porte des vestiaires, et n'y trouve personne. J'ouvre un casier, j'attrape de quoi me changer et planque ma blouse de malade avant de parfaire ma tenue d'un badge et d'un masque. Je ressors et effectivement, l'alarme est donnée. Un des patients vient de se faire la belle et ça les fait chier. Ils courent, ils s'agitent et moi, d'un pas conquérant je vais jusqu'aux urgences, traversant le parterre de malades et de médecins sans ciller, un dossier entre les mains pour parfaire ma couverture. Et ce qui est beau, c'est que personne ne me remarque. Tous me laisse passer, me prenant pour un simple interne. Autour de moi c'est le chaos et en grand vainqueur, je finis par m'engouffrer par une porte de service et c'est à l'arrière du bâtiment que je sors. L'air frais de la nuit vient fouetter mon visage alors que je me débarrasse du badge et du dossier. Tout termine dans une grande benne. Je retire le masque et souris. Je suis libre. Je dois retenir un rire alors que je m'éloigne de cet enfer blanc, goûtant au plaisir d'avoir salement démonté le système et d'être désormais capable d'arpenter les rues comme bon me semble. Et alors que je fais mon chemin dans la foule, je regrette presque de n'avoir laissé aucun message… Qu'aurais-je dis de toute façon ? "On se reverra ?" Ce serait un mensonge et les mettre en garde aurait été idiot…. Non. C'est peut-être mieux ainsi.©️ 2981 12289 0
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Andréas
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« Mercy »
Lev & Ivan
Lev, Lev, Lev... me serais-je tellement trompé sur toi? Serais-je devenu un si mauvais juge de la nature humaine? Ou me serais-je contenté à ce point des apparences? D'un masque qu'il aurait porté tout ce temps sans que j'en voie rien? Et je m'en veux. Je m'en veux de ne pas avoir su l'aider, ou voir qu'il avait besoin d'aide à l'époque. De ne pas avoir soupçonné qu'il était comme ça, sous sa carapace, ou ce masque qu'il aurait choisi de porter face à moi. Des heures, des jours, des semaines même, côte à côte, frères d'armes dans des tranchées boueuses ou dans des planques sordides, à guetter, couvrir nos arrières quand ça chauffait, ou à simplement parler, jouer aux cartes ou parler du fonctionnement du monde pendant nos tours de garde alors que c'était l'enfer là-dehors. Des mois où je me suis douté de rien. Des semaines où j'ai dormi paisiblement près de lui, vulnérable et offert. A voir sa haine envers moi dans son regard, je me dis qu'il aurait pu me tuer. Qu'il en a eu l'occasion et qu'il l'a pas fait. Mais pourquoi? Parce qu'il en avait pas envie? Parce qu'il avait peur de tuer son chef? C'est terrible de se dire que le mec dont je me sentais le plus proche de tout le régiment était en fait une marionnette et qu'il y a un autre Lev caché derrière un brouillard épais.

Je pense à tout ça alors qu'il est sanglé dans un lit d'hôpital à un mètre de moi, et que je lui fais mécaniquement la lecture. Les mots s'enchaînent, l'histoire se déroule comme un ruban pendant que je pense, que je revoir des moments, des attaques, des gardes, des missions qu'on préparait à l'avance, des reconnaissances qu'on faisait. Et dans tout ça j'essaie de chercher la faille. L'indice. Ce qui m'a échappé. Ce que j'ai pas vu pendant tout ce temps. Ce que j'aurais dû voir si j'avais été un meilleur sergent. Si...j'en sais rien en fait, et c'est ça le pire. Pendant deux heures je lis, enchaînant les pages, me coupant que pour boire un peu d'eau, et lui lancer un sourire alors qu'en face de moi je n'ai qu'un visage fermé et un regard tellement sombre...

Finalement il est l'heure et je remballe mes affaires. Je reviendrai, parce qu'il fait partie de mes hommes, et j'ai des responsabilités envers lui. Je veux l'aider à guérir de ce qui ne va pas chez lui. A remonter la pente. A redevenir...normal? En tout cas pas la bête enragée qui a terrorisé tout l'hôpital. Je lui promets de repasser le voir, et alors que je suis sur le point de sortir, une dernière parole me fait sursauter. Il me cite un verset. Putain... de quoi il parle? Je n'ajoute rien, mais j'attrape juste un stylo dans ma poche et griffonne la référence sur le dos de ma main avant de filer. Je cogite encore sur le retour, sur le reste, mais on ajoute à ça ce fameux verset que je vérifierai à la maison. Il est flippant maintenant. Il est un autre Lev. Dr Jekyll et MrHyde, mais reste à savoir qui est l'original et qui est la création. Et j'ai peur que ce soit le monstre qui était là en premier...

Je gare ma moto dans le parking souterrain et grimpe dans l'ascenseur qui mène à mon appart. Une fois arrivé, je vais prendre Sasha dans son berceau et reviens voir Lyuba pour discuter avec elle de ce qui s'est passé pendant la journée. Sasha... deux mois, un minuscule petit homme, aux doigts si petits quand toute sa main attrape mon index ou mon pouce, et qui me regarde avec de grands yeux intéressés. Je lui donne le biberon, lui parle en le promenant dans tout l'appartement, et arrive l'heure du bain. C'est seulement dans la salle de bains, au moment de le déshabiller que je remarque la note sur le dos de ma main. Ah oui, c'est vrai... Je laisse Sasha sur la table à langer, une main sur son ventre pendant que de l'autre je sors mon portable de ma poche et pianote rapidement. Avant de me figer. C'est une putain de menace de mort. Encore une. Et celle la me fait encore plus peur parce qu'elle a été prononcée sur un ton foutrement calme. Quand Lyuba s'en va je baisse les volets et glisse mon flingue sous l'oreiller et un couteau sur le chevet. Ce foutu taré va me tuer, et il est assez bon pour réussir...

C'est la nuit où Vali est dehors, alors je vérifie bien la porte blindé et je vais me coucher. Un peu plus rassuré, je m'endors. Le lendemain je me dis que j'ai été con, parce que de toute façon il est bourré de médocs à l'hosto, sanglé à son lit, et qu'il y a aucune raison pour qu'il s'échappe. Enfin, c'est ce que je croyais... c'est seulement plusieurs jours plus tard que j'ai assez de temps pour passer à l'hosto. Sur place, je vais directement à sa chambre et je vois son lit vide. J'arrête une infirmière.

Bonjour, excusez moi, monsieur Baranov n'est plus ici?
Non monsieur.
Mais il n'était pas guéri, comment ça se fait?
Il s'est enfui ce matin.


Je me fige et elle file s'occuper de ses patients. Putain. Il est dans la nature. Il est dehors. Je fais passer le mot pour qu'on le retrouve vite et bien, et j'appelle immédiatement Valli pour lui dire que je viendrai la chercher ce soir. J'aime pas ça. J'aime pas ça du tout. Mon angoisse s'était calmée ces derniers jours mais savoir qu'il est dans la nature, avec la folle envie de me tuer... c'est pas bon. Vraiment pas bon. Je retourne bosser, appelant aussi Lyuba pour lui dire de ne pas quitter la maison et de ne laisser entrer personne jusqu'à ce que je revienne. J'attends Valli devant son boulot, mon flingue sous mon blouson, et je lui explique tout sur le chemin du retour. Une fois à la maison, je ferme volets et fenêtres, verrouille la porte et quand on va se coucher, je prends Sasha avec nous, l'installant avec son couffin dans un fauteuil près de mon côté du lit. La nuit va être longue et je déteste avoir l'impression que c'est moi la bête traquée...


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